<table id="tabletxt" > <tr> <td ><p class="petitpetit" ><a name="0" id="0"></a>Version 1.02 - Janvier 2011<!-- pywtitre====var --> </p> <p class="rougemaigre centre">Propri&eacute;t&eacute;, capital, rentabilit&eacute;, gaspillage, luxe...</p> <p class="petit centre rougemaigre">ou &quot;De la pauvret&eacute; &eacute;vang&eacute;lique&quot;</p> <blockquote> <p class="petit just ">Abstract: <!-- pywcomfort====var --> Pour redonner un sens chr&eacute;tien aux expressions un peu d&eacute;su&egrave;tes de &laquo;<span class="ital">pauvret&eacute; chr&eacute;tienne</span>&raquo;, &laquo;<span class="ital">voeux de pauvret&eacute;</span>&raquo; ou &laquo;<span class="ital">pauvret&eacute; monastique</span>&raquo;, il faut aujourd'hui commencer par les traduire... </p> </blockquote> <div class="just"> <p>Condamner la richesse ne signifie pas flirter la pauvret&eacute;. Avec Jésus, nous devrions d'ailleurs parler plus de méfiance et de défiance que de condamnation lorsqu'on essaye de comprendre son rapport à la richesse, et, plus globalement à l'argent.</p> <p>Le d&eacute;tachement absolu que J&eacute;sus a sugg&eacute;r&eacute; au jeune homme riche en guise de perfection <a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-richessechameau-tab.htm#0" target="" >(Mt19,16..., Mc10,17..., Lc,18,18...)</a> n'&eacute;tait pas tant un id&eacute;al en soi qu'un moyen de faire grandir cette &acirc;me-l&agrave;. </p> <p>Lorsque, sous forme de slogan, J&eacute;sus a cri&eacute; la b&eacute;atitude des pauvres, il faut bien entendre un slogan dans le sens moderne et politique du mot <a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-beatitudes-tab.htm#0" target="" >(Mt5,3, Lc6-20 et ses mille traductions!)</a>. J&eacute;sus ralliait les pauvres &agrave; son camp parce qu'il voulait revigorer tout ce que la terre portait de d&eacute;sesp&eacute;r&eacute;s, mais il va de soi – et le reste des évangiles le montre – que cela ne signifiait pas que J&eacute;sus voulu faire de la pauvret&eacute;, de la tristesse, du martyre, du bannissement, et des autres formes de souffrances l'horizon eschatologique de sa lutte. </p> <p>Non seulement J&eacute;sus n'adulait pas la pauvret&eacute; pour elle-m&ecirc;me mais lui-m&ecirc;me n'eut pas une vie de pauvre. Rien dans les évangiles ni dans les traces historiques rattach&eacute;es &agrave; la vie de J&eacute;sus ne nous autorise &agrave; le penser. N'en déplaise à Saint François, à Charles de Foucauld ou quelque autre Siméon le stylite que j'admire pourtant beaucoup, je pense, moi, que J&eacute;sus menait plut&ocirc;t un grand train de vie au regard des r&eacute;alit&eacute;s sociales de son &eacute;poque. Certes, Il n'est pas n&eacute; dans la sph&egrave;re des palais et des pr&eacute;toires, mais Il n'&eacute;tait pas non plus habill&eacute; d'une peau de chagrin et Il ne buvait pas que de l'eau claire. J&eacute;sus n'a pas &eacute;t&eacute; &eacute;lev&eacute; dans la mis&egrave;re ni dans l'indigence culturelle. Il semble m&ecirc;me avoir grandi dans un environnement familial de &laquo;dominants&raquo;.</p> <blockquote> <p><span class="turquoisemaigre">Jacques, le fr&egrave;re de J&eacute;sus, n'a-t-il pas pu, lui aussi, gagner une autorit&eacute; redoutable lorsque naissaient les premi&egrave;res Eglises? (Ni Pierre ni Paul ne purent compter sans lui dans l'ordonnance de ces premi&egrave;res communaut&eacute;s... voir par exemple la dynamique de l'autorit&eacute; lors du <a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-concilejerusalem%20ac15-tab%20.htm" target="" >1er concile de J&eacute;rusalem</a> (Actes15 et en particulier Ac15,13)</span>. </p> <p class="turquoisemaigre">De Joseph, le papa de J&eacute;sus, la l&eacute;gende dor&eacute;e veut qu'il fut charpentier (<a href="../rel-citationsbible/1cho-tab.htm#1354" target="" >Mt13,55</a>, <a href="../rel-citationsbible/2tob-tab.htm#062" target="" >Mc6,3</a>), ce qui n'est pas le moindre des m&eacute;tiers &agrave; cette &eacute;poque. (En stricte philologie, il n'&eacute;tait peut-&ecirc;tre que ma&ccedil;on mais pourquoi ne pas pr&ecirc;ter cr&eacute;dit &agrave; la tradition?) </p> <p class="turquoisemaigre">Quand &agrave; Marie, rien ne nous laisse entendre qu'elle provenait d'une famille mis&eacute;rable. D'ailleurs, si l'on en croit la l&eacute;gende dor&eacute;e, sa cousine Elisabeth (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0135" target="" >Lc1,36</a>) aurait &eacute;pous&eacute; un homme qui savait &eacute;crire (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0161" target="" >Lc1,62</a>) et &eacute;tait bien int&eacute;gr&eacute; dans la soci&eacute;t&eacute; Juive de l'&eacute;poque puisqu'il &eacute;tait de fait et non seulement de naissance parmi les candidats que le sort d&eacute;signerait pour le service liturgique au Temple de J&eacute;rusalem (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#018" target="" >Lc1,9</a>). Cette m&ecirc;me Elisabeth donnera un fils &agrave; son mari qui ne semblera pas plus d&eacute;nu&eacute; d'autorit&eacute; et d'&eacute;ducation, c'est le moins qu'on puisse dire (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0156" target="" >Lc1,57</a>)... </p> </blockquote> <p>Si J&eacute;sus fut r&eacute;ellement mis au monde dans une mis&eacute;rable cr&egrave;che, c'est pour une raison accidentelle. C'est explicitement dit <a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#026" target="" >(Lc2,7)</a>. Il faut se remettre dans le contexte de l'&eacute;poque pour comprendre aussi qu'un aubergiste n'avait pas n&eacute;cessairement envie d'avoir &agrave; assumer un accouchement dans son &eacute;tablissement au moment o&ugrave; les clients faisaient la queue. Non seulement un accouchement (toujours dangereux &agrave; cette &eacute;poque) mobilise beaucoup d'espace et implique beaucoup de vas et viens mais, surtout, vis-&agrave;-vis des autres clients, il fallait aussi compter avec l'impuret&eacute; religieuse de la chose. Cette malheureuse co&iuml;ncidence du terme de la grossesse de Marie avec le d&eacute;placement &agrave; Bethl&eacute;em t&eacute;moigne par elle-m&ecirc;me de ce que la famille de J&eacute;sus &eacute;tait bien ins&eacute;r&eacute;e dans une structure sociale et politique dont elle assumait les lourdeurs: la premi&egrave;re cause de la malchance, c'&eacute;tait le recensement demand&eacute; par l'administration Romaine (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0179" target="" >Lc1,80</a>). </p> <p>Pour la pr&eacute;sentation du b&eacute;b&eacute; au Temple, comme pour la toute grande majorit&eacute; des Juifs qui ne se sentaient pas n&eacute;cessairement encline &agrave; engraisser un clerg&eacute; d&eacute;j&agrave; prosp&egrave;re, les jeunes parents de J&eacute;sus n'offrirent en sacrifice qu'un peu de volaille (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0223" target="" >Lc2,24</a>). Cette pingrerie n'est pas un indice de pauvret&eacute; et d'ailleurs, toujours selon la &laquo;l&eacute;gende dor&eacute;e&raquo;, la famille de J&eacute;sus faisait le ‘p&egrave;lerinage' de J&eacute;rusalem une fois par an (!) (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0240" target="" >Lc2,41</a>...). Elle pouvait donc en assumer la d&eacute;pense et le manque &agrave; gagner. </p> <p>J&eacute;sus, qui savait au moins lire (<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#0415" target="" >Lc4,16</a>...), n'avait pas que des indigents dans sa sph&egrave;re. Son ami Lazare dont l'amiti&eacute; fut si vive que J&eacute;sus pleura &agrave; l'occasion de son d&eacute;c&egrave;s (<a href="../rel-citationsbible/4oty-tab.htm#1134" target="" >Jn11,35</a>), &eacute;tait un riche puisque son corps fut enseveli dans un tombeau de pierres (<a href="../rel-citationsbible/4oty-tab.htm#1137" target="" >Jn11,38</a>...). Et, par ailleurs, en lisant les textes, nous ne sommes pas vraiment invit&eacute;s &agrave; penser que la soeur de Lazare d&ucirc; s'endetter pour acheter ce pr&eacute;cieux nard dont elle parfuma J&eacute;sus <a href="../rel-citationsbible/4oty-tab.htm#1210" target="" >(Jn12,1-11</a>)... </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">La sph&egrave;re de Lazare n'&eacute;tait pas faite que de mis&eacute;rable besogneux! Parmi les nombreux juifs qui ont fait le d&eacute;placement de B&eacute;thanie pour les fun&eacute;railles et apr&egrave;s la r&eacute;surrection miraculeuse, certains avaient l'oreille attentive de ceux qui comptent &agrave; J&eacute;rusalem. (<a href="../rel-citationsbible/4oty-tab.htm#1144" target="" >Jn11,45-46</a>). J&eacute;sus entretenait bel et bien des liens affectueux avec une famille cossue et influente ! </p> </blockquote> <p>Ces anecdotes (et quelques autres que les lecteurs des évangiles pourront ais&eacute;ment rep&eacute;rer) semblent donc peu compatibles avec l'id&eacute;e d'un J&eacute;sus tr&egrave;s pauvre que Charles de Foucauld, par exemple, aimait publier. Si l'on devait transposer tout ce que je viens d'&eacute;num&eacute;rer en &eacute;quivalant pour notre &eacute;poque, on aurait probablement un J&eacute;sus appartenant &agrave; la petite bourgeoisie. </p> <p>La pauvret&eacute;, &agrave; cette &eacute;poque, comme &agrave; la n&ocirc;tre, c'est une toute autre affaire! Judas devait le rappeler chez Lazare de B&eacute;thanie justement (<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-onctionbethanie-tab.htm#0" target="" >Jn12</a>), dans cette dispute qui <a href="../rel-exeg/rel-exeg-judas-tab.htm#onction" target="" >mit le feu aux poudres</a>. L'argument de Judas contre la d&eacute;pense scandaleuse de la soeur de Lazare (au bas mot un an de salaire d'un ouvrier agricole pour un flacon de nard vid&eacute; en quelques minutes) nous certifie au moins qu'autour de J&eacute;sus, on est bien conscient de ce qu'est la vraie pauvret&eacute;. Si Judas choisit cet argument-l&agrave; (<a href="../rel-citationsbible/4tob-tab.htm#124" target="" >Jn12,5</a>), c'est que l'assembl&eacute;e pr&eacute;sente y pr&ecirc;tait un cr&eacute;dit particulier. Cette vraie pauvret&eacute;, tout le monde en convenait, y compris J&eacute;sus, il fallait la combattre! Gr&acirc;ce au probl&egrave;me de conscience de Judas (que Jean a sous-&eacute;valu&eacute; pour des raison limpides <a href="../rel-exeg/rel-exeg-jean-tab.htm#bethanie" target="" >d&eacute;velopp&eacute;es ailleurs</a>), nous savons aussi que J&eacute;sus et ses disciples aidaient les pauvres <a name="foucauld"></a>puisqu'au c&eacute;nacle, il a paru normal qu'&eacute;ventuellement un disciple quitta l'assembl&eacute;e pour donner des aum&ocirc;nes (<a href="../rel-citationsbible/4oty-tab.htm#1328" target="" >Jn13,29</a>)... un esprit de charit&eacute; qui se retrouve en beaucoup d'autres textes &eacute;vang&eacute;liques (<a href="../rel-citationsbible/3oty-tab.htm#1411" target="" >Lc14,12</a>, <a href="../rel-citationsbible/3oty-tab.htm#1821" target="" >Lc18,22</a>...) . </p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> <p align="center" class="rougegras">Charles de Foucauld imite J&eacute;sus? </p> <p align="center" class="rougegras">&nbsp;</p> <p></p> <p align="center" class="rougemaigre">&nbsp;</p> <p>Malgré ces évidences évangéliques, en poussant le Texte dans ses plus obscurs retranchements, certains nous ont pourtant laissé croire que, pris dans le mouvement de son engagement, Jésus se serait lui-même fait pauvre. Jésus, à la manière de son émule François d'Assise, se serait dépouillé de tout pour marcher vers le Royaume... Cette thèse est d'autant plus intenable qu'il y a dans les évangiles un extrémiste de ce genre: Jean-Baptiste. Par rapport à lui, Jésus prend explicitement ses distances (pour mieux désigner la différence entre ces deux styles de vie, les Évangélistes font parler une tierce personne, un pharisien, qui s'en étonne - <a href="../rel-citationsbible/2sem-tab.htm#0217" target="" >Mc2,18-22</a>, <a href="../rel-citationsbible/3ser-tab.htm#0532" target="" >Lc5,33-39</a>...). Plus tard, les exigences évangéliques ne protégeront évidemment pas ses disciples ni de la nécessité de pratiquer parfois l'ascèse, ni des revers du destin, ni de problèmes financiers, mais ce sont là de toutes autres affaires que de chercher à être pauvre! </p> <p> On peut aborder les évangiles sous de multiples perspectives, mais jamais, me semble-t-il, l'id&eacute;al de J&eacute;sus ne fut de ressembler &agrave; Lazare – et cette fois je ne fais plus allusion au Lazare-ami mais &agrave; son homonyme qui pourrit de mis&egrave;re en face de la porte d'un riche... (<a href="../rel-citationsbible/3ser-tab.htm#1618" target="" >Lc16,19-31</a>) </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">&nbsp;</p> <p align="center" class="vertgras">Evolution du mot &quot;pauvret&eacute;&quot;:</p> <p>&nbsp; </p> <p>&nbsp; </p> <p>Pourquoi alors un gaillard tel que Charles de Foucauld (un exemple parmi d'autres mais qui pr&eacute;sente pour nous l'avantage d'avoir v&eacute;cu il n'y a pas tr&egrave;s longtemps), pensait-il que le Christ nous demandait et vivait lui-m&ecirc;me dans un d&eacute;pouillement extr&ecirc;me? </p> <p>En r&eacute;pondant &agrave; cette question, on pourra peut-&ecirc;tre d&eacute;construire le &laquo;malentendu&raquo; qui circule encore dans certains milieux chr&eacute;tiens autour du sens &agrave; accorder au mot ‘<span class="ital">pauvret&eacute;</span>'... </p> <p>Dans ce dessein, il nous faut d'abord mettre en lumi&egrave;re un mouvement de balancier aux fondations du langage. </p> <p>Ni les &eacute;vang&eacute;listes ni les historiens contemporains n'associent &agrave; la pauvret&eacute; la <a href="../rel-bud/rel-bud-symbole%20et%20langage-tab.htm#0" target="" >r&eacute;f&eacute;rence symbolique</a> dont saint Fran&ccedil;ois et Charles de Foucauld chargent ce mot. Derri&egrave;re le mot ‘<span class="ital">pauvre</span>', des facettes du r&eacute;el ont &eacute;t&eacute; rapproch&eacute;es –voire fusionn&eacute;es– pendant de nombreux si&egrave;cles alors qu'elles furent clairement distinctes &agrave; l'&eacute;poque de J&eacute;sus et qu'elles sont redevenues distinctes &agrave; notre &eacute;poque. Cette longue p&eacute;riode de confusion fut-elle le prix de l'appartenance &agrave; des cultures moins subtiles sur les questions de mis&egrave;re et de compassion? Possible. J'&eacute;viterai en tout cas de me prononcer trop clairement &agrave; propos de saint Fran&ccedil;ois parce que l'&eacute;tude de l'ordre symbolique et langagier du moyen-&acirc;ge demande trop d'&eacute;rudition. Je me contente de constater que Charles de Foucauld, au d&eacute;but du XX&egrave;me si&egrave;cle, transbahute encore ce genre de vision &laquo;simplifi&eacute;e&raquo; des r&eacute;alit&eacute;s sociales. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Pour comprendre Charles de Foucauld, il n'est pas encore devenu n&eacute;cessaire de recourir &agrave; des traductions ni &agrave; des &eacute;minents philologues... Par ailleurs, Charles de Foucauld n'&eacute;tait pas suffisamment th&eacute;ologien que pour nous obliger &agrave; recourir aux plus subtiles ressources de l'herm&eacute;neutique. Un gaillard comme Ren&eacute; Basin, qui consacra une <a href="../rel-citationsdicos/rel-ref-dicoperso.htm#bazin" target="" >biographie</a> &agrave; Charles de Foucauld dans l'entre-deux-guerres, transbahute lui-m&ecirc;me encore cet ordre symbolique d&eacute;suet qui avait consid&eacute;rablement influenc&eacute; la morale pendant plus d'un mill&eacute;naire !</p> </blockquote> <p>Soyons concret au risque d'&ecirc;tre caricatural: pour le grand public, une fusion/confusion existait encore au XIX&egrave;me et au d&eacute;but du XX&egrave;me entre ce qu'il y a derri&egrave;re le mot ‘<span class="ital">pauvret&eacute;</span>' et ce que l'on englobe aujourd'hui plut&ocirc;t sous l'expression ‘<span class="ital">mauvaises conditions de vie</span>'. Aujourd'hui comme &agrave; l'&eacute;poque de J&eacute;sus celui qui couche sur le sol avec une pierre pour oreiller (<a href="../rel-citationsbible/1sem-tab.htm#0819" target="" >Mt8,20</a>, <a href="../rel-citationsbible/3seg-tab.htm#0957" target="" >Luc9,58</a>) n'a ni les qualit&eacute;s, ni les m&eacute;rites, ni les droits d'un pauvre mais ceux d'un asc&egrave;te. C'&eacute;tait, semble-t-il beaucoup moins clair pour Charles de Foucauld qui croyait (et disait) pouvoir imiter ainsi une pseudo-pauvret&eacute; de J&eacute;sus plut&ocirc;t que la relation compliqu&eacute;e que J&eacute;sus entretenait avec le luxe ou son engagement social. En pratique cela revient au m&ecirc;me me direz-vous: tous les deux dorment sur le dur... Non! Cela ne revient pas au m&ecirc;me! C'est un rapport sophistiqu&eacute; au luxe et &agrave; l'engagement qui motivait J&eacute;sus, pas une hypoth&eacute;tique vertu de la pauvret&eacute;. </p> <p>Disons le autrement: aujourd'hui tout comme &agrave; l'&eacute;poque de J&eacute;sus, celui qui se rev&ecirc;t d'une peau de chameau et se nourrit de sauterelles ne peut pas s'attribuer les droits et les valeurs qu'on accorde plus ou moins volontiers aux pauvres: droit de mendier, m&eacute;rite de voter, droit de voler pour manger, respectabilit&eacute;, etc. (Sur ce dernier point, il faut tout de m&ecirc;me remarquer une diff&eacute;rence importante entre l'&eacute;poque de J&eacute;sus et la n&ocirc;tre: le pauvre est devenu bien plus respectable et audible dans le d&eacute;bat public qu'il ne l'&eacute;tait, en d&eacute;pit de la l&eacute;gislation mosa&iuml;que tr&egrave;s moderne en la mati&egrave;re)... Aujourd'hui et &agrave; l'&eacute;poque de J&eacute;sus, celui qui choisit de ne vivre que d'air pur et d'eau fra&icirc;che n'est en aucune mani&egrave;re un pauvre, m&ecirc;me si, &eacute;ventuellement, il vit ‘comme' un pauvre. </p> <p>La mani&egrave;re de calculer les droits et m&eacute;rites du pauvre n'est donc plus aujourd'hui –et pas plus &agrave; l'&eacute;poque de J&eacute;sus!– ce qu'elle a &eacute;t&eacute; pour Charles de Foucauld. L'&eacute;thique que Foucauld promeut par sa vie, en digne &eacute;mule de saint Fran&ccedil;ois et de saint Bernard, reste recevable bien s&ucirc;r, mais pas au nom de vertus suppos&eacute;es li&eacute;es &agrave; la pauvret&eacute; dans le sens &eacute;vang&eacute;lique ou contemporain du mot... </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Aujourd'hui, les devoirs moraux les plus &eacute;l&eacute;mentaires ne ressemblent plus &agrave; ceux du moyen-&acirc;ge. La pratique de l'aum&ocirc;ne &laquo;verticale&raquo; dont Charles de Foucauld &eacute;tait encore un fervent pratiquant, et plus g&eacute;n&eacute;ralement toute la dynamique de la mendicit&eacute; a subi des bouleversements de sens consid&eacute;rables d&egrave;s que la solidarit&eacute; et l'instruction sont devenues des obligations l&eacute;gale (s&eacute;curit&eacute; sociale sous ses multiples formes). Nietzsche par exemple, se permettra m&ecirc;me de d&eacute;nicher la faiblesse voire la pure bassesse de l'approche moyen&acirc;geuse de l'aum&ocirc;ne ...et il avait bien raison! &Agrave; son insu, Nietzsche allait donner ainsi un salutaire coup de pieds au cul des intellectuels chr&eacute;tiens endormis et les obliger &agrave; retourner consulter les fondations de leurs valeurs... Le plaidoyer de Nietzsche &eacute;tait simplement prononc&eacute; un peu trop t&ocirc;t et avec un peu trop de haine que pour &ecirc;tre d'embl&eacute;e avalis&eacute; par les chr&eacute;tiens. Il faut aussi voir qu'&agrave; cette &eacute;poque la s&eacute;curit&eacute; sociale moderne n'en &eacute;tait encore qu'&agrave; des balbutiements ...or, c'est surtout elle qui fera bouger les choses dans la mentalit&eacute; du peuple. </p> </blockquote> <p>Au XXIe si&egrave;cle le pauvre n'a plus la moindre vertu morale par son indigence. S'il a conquis des droits et des m&eacute;rites, c'est par sa malchance plus que par son d&eacute;nuement. Et si sa &laquo;pauvret&eacute;&raquo; est volontaire, c'est encore une tout autre arithm&eacute;tique de la vertu qui se met en place. Le clochard volontaire, dans la morale naturelle contemporaine, n'a plus exactement les m&ecirc;mes m&eacute;rites que le ‘vrai' pauvre mais il en garde malgr&eacute; tout quelques droits. Il gagne aussi, &eacute;ventuellement, l'attention intrigu&eacute;e de l'observateur salari&eacute; qui, lui, est de toute fa&ccedil;on tenu de payer sa caution de solidarit&eacute; sans que ce soit une affaire de morale (c'est le refus de payer sa quote-part &agrave; la s&eacute;curit&eacute; sociale qui est devenu une affaire morale!). </p> <p>Selon les r&egrave;gles du nouvel ordre symbolique, Charles de Foucauld ne fut pas un pauvre tout simplement parce qu'il a gard&eacute; jusqu'&agrave; la fin de ses jours la possibilit&eacute; de redevenir un nanti en deux temps trois mouvements. Aujourd'hui, cette r&eacute;versibilit&eacute; de son &eacute;tat est d'ailleurs un des crit&egrave;res d'exclusion pour celui qui voudrait obtenir l'assistance des institutions charitables. Pour les ONGs et m&ecirc;me pour la plupart des &eacute;tats-providence, l'indemnit&eacute; sociale est imp&eacute;rativement destin&eacute;e aux ‘vrais' pauvres. </p> <p>Charles de Foucauld fut-il &eacute;vang&eacute;lique? Il le fut... En tout cas, il le fut indiscutablement au moins &agrave; son &eacute;poque. Mais aujourd'hui, le profane instruit pr&eacute;f&eacute;rera voir en lui plut&ocirc;t un &laquo;Diog&egrave;ne chr&eacute;tien&raquo; que l'imitateur de J&eacute;sus qu'il crut &ecirc;tre. </p> <p>Ceux qui aujourd'hui, en connaissance de cause, font une donation aux &eacute;mules de Charles de Foucauld (pour les &laquo;petits fr&egrave;res&raquo; et non pour leurs oeuvres!), aux Clarisses de stricte observance, aux clochards professionnels et autres bonzes, le font dans le cadre de la spiritualit&eacute; plut&ocirc;t que dans celui de l'&eacute;thique. Ils servent donc la fortune d'une certaine id&eacute;e du salut bien plus que la morale naturelle avec ses nouveaux crit&egrave;res de la justice sociale. </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">*** </p> <p>&nbsp; </p> <p>Pour redonner un sens chr&eacute;tien aux expressions un peu d&eacute;su&egrave;tes de &laquo;<span class="ital">pauvret&eacute; chr&eacute;tienne</span>&raquo;, &laquo;<span class="ital">voeux de pauvret&eacute;</span>&raquo; ou &laquo;<span class="ital">pauvret&eacute; monastique</span>&raquo;, il faut donc aujourd'hui commencer par les traduire. Il ne faudrait pas laisser l'ignare penser qu'il y a hypocrisie dans l'air parce que, par exemple, les moines (chr&eacute;tiens ou bouddhistes) sont correctement nourris, correctement log&eacute;s et correctement v&ecirc;tus... On parle de plus en plus de &laquo;<span class="ital">simplicit&eacute; &eacute;vang&eacute;lique</span>&raquo;, de &laquo;<span class="ital">simplicit&eacute; monastique</span>&raquo;, de mener une vie &laquo;<span class="ital">zen</span>&raquo;... </p> <p>Cela nous conduit &agrave; prendre en consid&eacute;ration d'autres nuances symboliques sous-jacentes aux mots lorsqu'on veut comprendre le rapport que J&eacute;sus entretenait avec l'argent, la richesse, le confort et le luxe. Pour ceux que le mot &laquo;<span class="ital">simplicit&eacute;</span>&raquo; rebuterait, on remarquera vite qu'il reste bien une place, non pas pour la pauvret&eacute; pure et dure avec son lot d'ins&eacute;curit&eacute; et d'ignorances, mais pour quelque chose qui m&eacute;rite malgr&eacute; tout l'appellation de &laquo;<span class="ital">pauvret&eacute; &eacute;vang&eacute;lique</span>&raquo;. Pour y arriver, nous devrons consid&eacute;rer les engagements du Christ vis-&agrave;-vis de notions comme l'in&eacute;galit&eacute;, la gestion, l'outil de production, le rendement, le gaspillage... </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">* <a name="inegalite"></a></p> <p class="rougemaigre centre">In&eacute;galit&eacute;s mat&eacute;rielles &eacute;vang&eacute;liques.</p> <!-- pywcomfort====var --> <p class="petitpetit centre">&nbsp; </p> <p>Par-del&agrave; ses mille critiques et les mille r&eacute;serves vis-&agrave;-vis de la richesse (<a href="../rel-citationsbible/3seg-tab.htm#1232" target="" >Lc12,33-34</a>, <a href="../rel-citationsbible/3oty-tab.htm#1432" target="" >Lc14,33</a>, etc.), il est aussi ind&eacute;niable que J&eacute;sus admet qu'il y ait parfois concentration de grands moyens mat&eacute;riels dans les mains de quelques personnes. Il y a dans les évangiles des riches imaginés (les patrons dans les paraboles) ou en chair et en os (Lazare de B&eacute;thanie -<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-lazarebethanie-tab.htm#0" target="" >Jn11</a>&amp;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-onctionbethanie-tab.htm#0" target="" >12</a>-, Zach&eacute;e -<a href="../rel-citationsbible/3jer-tab.htm#191" target="" >Lc19,1-9</a>-...) qui ont le bon r&ocirc;le tout en restant riches. Quelques propri&eacute;taires &eacute;vang&eacute;liques qui ne sont en aucune fa&ccedil;on des images de Dieu le P&egrave;re nous sont propos&eacute;s comme mod&egrave;les (&laquo;Tr&eacute;sor Cach&eacute;&raquo;-<a href="../rel-citationsbible/1cho-tab.htm#1344" target="" >Mt13,44</a>...). Et dans les paraboles o&ugrave; des patrons fortun&eacute;s sont manifestement l'image de Dieu le P&egrave;re, certains sont aussi offerts comme des mod&egrave;les &agrave; suivre pour ceux qui, en bon droit, seraient convi&eacute;s &agrave; devenir de bons riches et de bon patrons ici-bas (ce n'est &eacute;videmment pas n&eacute;cessairement le th&egrave;me central de ces paraboles). Devant la facticit&eacute; d'une pseudo ‘justice naturelle', ces riches patrons auraient m&ecirc;me la t&acirc;che particuli&egrave;rement d&eacute;licate de g&eacute;rer sans les abolir des ‘injustices' estim&eacute;es n&eacute;cessaires (&laquo;L'enfant Prodigue&raquo; -<a href="../rel-citationsbible/3jer-tab.htm#1510" target="" >Lc15,11-31</a>, ou la &quot;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-talents-tab.htm#0" target="" >Parabole des Talents</a>&quot;; ou ‘&quot;Les Ouvriers de la Derni&egrave;re Heure&quot; -<a href="../rel-citationsbible/1tob-tab.htm#201" target="" >Mt20,1-16</a>- (...) Cf. &eacute;tude sur l'<a href="rel-eth-injusticededieu-tab.htm#0" target="" >injustice de Dieu</a> sur ce m&ecirc;me site) </p> <p>De fait -c'est un des leitmotiv &eacute;vang&eacute;liques- J&eacute;sus n'est pas un strict &laquo;&eacute;galitariste&raquo; ni en mati&egrave;re de droit (Perles et Pourceaux -<a href="../rel-citationsbible/1oty-tab.htm#075" target="" >Mt7-6</a>-), ni en mati&egrave;re de devoir (Tronc au Temple -<a href="../rel-citationsbible/2oty-tab.htm#1240" target="" >Mc12,41-44</a>), ni en mati&egrave;re de distribution des avoirs (&laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-talents-tab.htm#0" target="" >Talents</a>&raquo;)... La propri&eacute;t&eacute; de grands biens n'est donc jamais &agrave; elle seule, ‘en soi', cette forme de <strong>richesse </strong> qu'il a violement d&eacute;cri&eacute;e et condamn&eacute;e. Tous &quot;fr&egrave;res&quot;, peut-&ecirc;tre, mais pas tous &quot;identiques&quot;... </p> <p>Les motivations qui conduisent J&eacute;sus &agrave; accepter la concentration in&eacute;galitaire des biens mat&eacute;riel sont en g&eacute;n&eacute;ral admises par la morale naturelle contemporaine (gestion coh&eacute;rente du capital de production, rentabilit&eacute;...). Dans les motivations qui conduisent J&eacute;sus &agrave; cette tol&eacute;rance, il y en a tout de m&ecirc;me une dont l'analyse est plus p&eacute;rilleuse: le luxe (les deux plus c&eacute;l&egrave;bres passages &eacute;vang&eacute;liques &agrave; ce propos sont &laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-onctionbethanie-tab.htm#0" target="" >l'Onction de B&eacute;thanie</a>&raquo;, et la &laquo;Tunique en un seul tenant&raquo; -<a href="../rel-citationsbible/4tob-tab.htm#1922" target="" >Jn19,23</a>-...). J&eacute;sus construit une th&eacute;ologie du luxe tr&egrave;s subtile qui m&eacute;ritera d'&ecirc;tre &eacute;tudi&eacute;e pour elle-m&ecirc;me (voir plus loin). </p> <p>Pourquoi alors cette duret&eacute; vis-&agrave;-vis du &laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-richessechameau-tab.htm#0" target="" >jeune homme riche</a>&raquo;&nbsp;par exemple? </p> <p>&nbsp;</p> <p>Cet &eacute;pisode est vraiment paradigmatique. </p> <p>Remarquons d&eacute;j&agrave; qu'il se termine par une sentence qui est une mise en ab&icirc;me paradoxal pour nous interdire justement de trop simplifier! (<span class="ital vertmaigre">&quot;...Pour les humains, c'est impossible, mais pour Dieu tout est possible...&quot; </span>-Mt19,26-) </p> <p>Le jeune homme riche, contrairement &agrave; Zach&eacute;e (<a href="../rel-citationsbible/3jer-tab.htm#191" target="" >Lc19,1-9)</a>, ne veut pas tant s'am&eacute;liorer qu'&ecirc;tre parfait. Ce n'est qu'apr&egrave;s avoir demand&eacute; cette perfection que J&eacute;sus l'invite au d&eacute;nuement. De lui, J&eacute;sus n'exigeait rien au d&eacute;part. Entrant alors, sur son invitation, dans le contexte de ce jeune homme, J&eacute;sus d&eacute;busque un blocage li&eacute; &agrave; sa fortune. La suite prouve qu'il ne s'est pas tromp&eacute;... </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">La nature pr&eacute;cise de ce blocage n'est pas explicit&eacute;e mais &eacute;tait-ce n&eacute;cessaire? Tout le monde sait ce que l'argent peut susciter comme r&eacute;gressions, comme fixations, comme inerties. Le jeune homme &eacute;tait-il imparfait parce que sa richesse s'accompagnait de cette ingratitude et de cette autosatisfaction auxquels le pr&eacute;disposait un pr&eacute;jug&eacute; v&eacute;t&eacute;rotestamentaire faisant de la richesse un des signes de la b&eacute;n&eacute;diction divine? Le jeune homme &eacute;tait-il paresseux? Le jeune homme &eacute;tait-il indignement asservi au luxe? Souffrait-il d'avarice ou de concupiscence?... Cela revient au fond toujours &agrave; la m&ecirc;me chose: la richesse, comme si elle &eacute;tait un malin g&eacute;nie, essaye d'organiser l'addiction de son propri&eacute;taire et invite &agrave; la d&eacute;votion de l'or pour lui-m&ecirc;me: c'est Mamon, l'idol&acirc;trie, une forme particuli&egrave;re de l'esclavage qui est contraire aux fonctions l&eacute;gitimes de l'argent - <a href="../rel-citationsbible/1sem-tab.htm#0623" target="" >Mt6,24</a>... </p> </blockquote> <p>&nbsp; </p> <p align="center">* </p> <p align="center"><a name="propriete"></a>Propri&eacute;t&eacute; et gestion: </p> <p align="center">* </p> <p>&nbsp; </p> <p>Selon les évangiles, pour &eacute;tablir son syst&egrave;me de valeurs, J&eacute;sus fait une distinction symbolique nette entre la <strong>propri&eacute;t&eacute; </strong> et la <strong>gestion </strong>. (&laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-intendantmalhonnete-tab.htm#0" target="" >L'Intendant Malhonn&ecirc;te</a>&raquo;, &laquo;intendant fou&raquo; <a href="../rel-citationsbible/1sem-tab.htm#2444" target="" >Mt24,45-51</a>, etc. ) Il n'y a pas beaucoup d'ambigu&iuml;t&eacute; sur ce point: s'il faut vraiment pr&eacute;server la possibilit&eacute; d'&ecirc;tre propri&eacute;taire de grands biens, qu'au moins le riche sache qu'il est toujours simultan&eacute;ment un simple d&eacute;positaire: il aura donc toujours des comptes &agrave; rendre. </p> <p>&nbsp; </p> <p>Quels sont les devoirs du propri&eacute;taire-gestionnaire &eacute;vang&eacute;lique? </p> <p>Imp&eacute;rieuse comme peut l'&ecirc;tre une urgence m&eacute;dicale et dominant tous les autres devoirs, il est irr&eacute;m&eacute;diablement immoral de laisser quiconque croupir dans l'indigence, la mis&egrave;re (parabole du &laquo;Pauvre Lazare&raquo; - <a href="../rel-citationsbible/3ser-tab.htm#1618" target="" >Lc16,19-31</a>). Sur ce devoir, J&eacute;sus ne transige pas. Ce n'est pas propre au christianisme; ce devoir-l&agrave; appartient aussi &agrave; l'Ancien Testament et &agrave; quasi toutes les autres religions du monde... </p> <p>&Agrave; cette r&egrave;gle fondamentale, J&eacute;sus ajoute une autre r&egrave;gle qui guidera aussi bien le pauvre que le riche. Cette deuxi&egrave;me r&egrave;gle, qui pour le coup est une obsession plus lancinante dans le christianisme que dans les autres religions, sera bien plus lourde &agrave; porter pour le riche: la charit&eacute;. </p> <p>On peut &eacute;ventuellement entendre cette charit&eacute; comme la pratique de l'aum&ocirc;ne, mais alors il s'agirait d'une aum&ocirc;ne discr&egrave;te (<a href="../rel-citationsbible/1sem-tab.htm#062" target="" >Mt6,3-4</a>) et accomplie sans calcul! Le texte des assises du jugement dernier (<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-assisesmt25-tab.htm#0" target="" >Mt25,31-46</a>) en est vraiment le manifeste: donner sans m&ecirc;me devoir se rendre compte que J&eacute;sus est toujours celui &agrave; qui l'on donne, m&ecirc;me s'il s'agit d'un criminel... </p> <p>Dans cette mise en sc&egrave;ne du jugement dernier, alors que les damn&eacute;s ont toujours secouru J&eacute;sus lorsqu'ils l'ont reconnu, les &eacute;lus, tout &eacute;tonn&eacute; d'&ecirc;tre admis au paradis, se demandent &agrave; quels moments ils ont fait leurs bonnes actions vis-&agrave;-vis de J&eacute;sus qu'ils pensaient pourtant n'avoir jamais rencontr&eacute; &laquo; <em>...Seigneur, quand t&rsquo;avons-nous vu avoir faim, et t&rsquo;avons&ndash;nous donn&eacute; &agrave; manger? ou avoir soif, et t&rsquo;avons-nous donn&eacute; &agrave; boire? Quand t&rsquo;avons-nous vu &eacute;tranger, et t&rsquo;avons-nous recueilli? ou nu, et t&rsquo;avons-nous v&ecirc;tu? Quand t&rsquo;avons-nous vu malade, ou en prison, et sommes&ndash;nous venus te voir?... </em>&raquo;. </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">* </p> <p align="center"><a name="distribution"></a>Politique et distribution: </p> <p align="center">* </p> <p>&nbsp; </p> <p>D&egrave;s qu'on quitte les questions d'indigence, en ce qui concerne la politique sociale, J&eacute;sus n'a pas &eacute;t&eacute; tr&egrave;s loquasse. Il a m&ecirc;me parfois carr&eacute;ment et explicitement refus&eacute; de s'engager dans des d&eacute;tails contextuels de la distribution de l'argent pour en rester &agrave; l'&eacute;nonciation de grands principes (voir l'&eacute;pisode de l'h&eacute;ritage &agrave; partager -<a href="../rel-citationsbible/3oty-tab.htm#1212" target="" >Lc12,13-14</a>). Pourquoi s'en &eacute;tonnerait-on? C'est typiquement une cons&eacute;quence de l'esprit de cette charit&eacute; particuli&egrave;re qu'il promeut. J&eacute;sus rend la justice distributive au bon vouloir de la qualit&eacute; du coeur plut&ocirc;t qu'&agrave; une quelconque loi universelle qui serait impossible &agrave; formuler dans une philosophie &agrave; ce point personnalisante et qui fait de tout riche un d&eacute;positaire. </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">* </p> <p align="center"><a name="capital"></a>Outil de production et rendement du capital.</p> <p align="center">* </p> <p>Pour ceux qui s'int&eacute;ressent aux th&eacute;ories &eacute;conomiques, il est utile de faire valoir que l'<strong>appareil de production </strong> est aussi sp&eacute;cifiquement (sommairement) trait&eacute; par J&eacute;sus. Le rendement et la capitalisation sont pris en consid&eacute;ration dans son Royaume! (&laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-talents-tab.htm#0" target="" >Parabole des Talents</a>&raquo; et assimilables mais surtout, surtout, surtout, la &laquo;parabole du tr&eacute;sor cach&eacute;&raquo; -<a href="../rel-citationsbible/1tob-tab.htm#1343" target="" >Mt13,44-46</a>, qui devrait de toute &eacute;vidence &ecirc;tre la parabole pr&eacute;f&eacute;r&eacute;e des capitalistes!). Si l'on d&eacute;tache ces passages de l'&eacute;crin &eacute;vang&eacute;lique, apr&egrave;s avoir aussi rappel&eacute; quelques ambigu&iuml;t&eacute;s de J&eacute;sus par rapport au luxe, on arriverait m&ecirc;me a faire de J&eacute;sus le th&eacute;oricien d'un capitalisme &laquo;pur, dur et m&eacute;chant&raquo;... Heureusement, les parapets &eacute;vang&eacute;liques contre cette d&eacute;rive sont encore plus &laquo;purs, durs et intransigeants&raquo;... </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">*</p> <p align="center"><span class="rougemaigre"><a name="securite" id="securite"></a></span>L'investissement s&eacute;curitaire</p> <p align="center" class="rougemaigre">Providence et assurances </p> <blockquote> <p class="petit">Abstract: J&eacute;sus m&eacute;prise les investissements s&eacute;curitaires au nom de la confiance.</p> </blockquote> <p>On savait tous que J&eacute;sus n'aimait pas l'avarice (<a href="../rel-citationsbible/1sem-tab.htm#0539" target="" >Mt5,40-42</a> et assimilables). Il nous fallait encore remarquer son m&eacute;pris pour l'investissement s&eacute;curitaire! S'il y a des th&eacute;saurisations admises, elles sont peut-&ecirc;tre destin&eacute;es aux moyens de production (<a href="../rel-citationsbible/1tob-tab.htm#1343" target="" >Mt13,44-46</a> et assimilables) ou &agrave; la th&eacute;ologie sophistiqu&eacute;e du luxe (voir plus loin) mais jamais pour assurer son propre avenir. Cette prise de position est particuli&egrave;rement embarrassante pour la morale naturelle du XXIe si&egrave;cle qui a bel et bien fait de la s&eacute;curit&eacute;, de &laquo;l'assurance&raquo; dans le large sens du mot, un de ses principaux chevaux de bataille. J&eacute;sus ne tarit pas d'&eacute;loquence pour d&eacute;noncer cette passion (&laquo;L'Engrangeur&raquo;- <a href="../rel-citationsbible/3jer-tab.htm#1214" target="" >Lc12,15-21</a>, &laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-providence-tab.htm#0" target="" >La Providence</a>&raquo;, etc.) </p> <p>J&eacute;sus n'est ni un capitaliste pur et dur, ni un communiste pur et dur, ni un pauvre, ni un riche mais par contre, du premier jusqu'au dernier jour, Il promeut la confiance! Cette confiance n'est pourtant pas assimilable &agrave; un go&ucirc;t du risque pour lui-m&ecirc;me; il est l'acte de foi par excellence. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Cette confiance est peut-&ecirc;tre la cl&eacute; de cette ‘pauvret&eacute;' &eacute;vang&eacute;lique chant&eacute;e par notre moyen-&acirc;ge. Rappelons ici que la pauvret&eacute; dont saint Fran&ccedil;ois s'est rev&ecirc;tu en rendant tous ses habits &agrave; son papa dans la cath&eacute;drale d'Assise, c'&eacute;tait surtout et avant tout un abandon de la protection que lui assurait une naissance, une cit&eacute;, une fortune... Un des principaux crit&egrave;res de la pauvret&eacute; au moyen-&acirc;ge n'&eacute;tait peut-&ecirc;tre pas tant le d&eacute;nuement (qui &eacute;tait le fait du plus grand nombre) que la non-appartenance &agrave; une sph&egrave;re de protection en ces temps o&ugrave; m&ecirc;me le meurtre d'un pauvre ne pr&ecirc;tait pas souvent &agrave; cons&eacute;quences... </p> </blockquote> <p>Je ne voudrais pas laisser croire que J&eacute;sus condamnerait toute forme d'investissement s&eacute;curitaire s'il avait v&eacute;cu &agrave; notre &eacute;poque. M&ecirc;me si le Texte n'est pas tr&egrave;s souple, il me semble qu'ici <a href="../rel-citationsdicos/rel-ref-dicoperso.htm#hermeneutique" target="" >l'herm&eacute;neutique</a> nous oblige &agrave; prendre quelques <a href="../rel-bud/rel-bud-vipa-philologietbouddhisme-tab.htm#nt" target="" >distances</a> par rapport &agrave; philologie...</p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Bien s&ucirc;r, J&eacute;sus n'aurait jamais tol&eacute;r&eacute; des investissements s&eacute;curitaires qui brisent aux racines la confiance et tentent de fonder la s&eacute;curit&eacute; sur la peur du gendarme plus que sur la maturit&eacute; et la libert&eacute; (pr&eacute;sence excessive des forces de l'ordre, cam&eacute;ras de vid&eacute;osurveillance, pl&eacute;thore de lois...). Il ne tol&eacute;rerait probablement pas plus ces &eacute;normes gaspillages de ressources encourag&eacute;s par les compagnies d'assurance l&agrave; o&ugrave; justement, en lieu et place des n&eacute;vroses et des angoisses il faudrait encourager <a href="rel-eth-responssabilite-tab.htm#0" target="" >le sens de la responsabilit&eacute;</a>et de<a href="rel-eth-responssabilite-tab.htm#0" target="" > l'engagement. </a></p> <p class="turquoisemaigre">Il me semble pourtant, et ce ne serait pas trop difficile de le d&eacute;montrer par l'esprit des Textes, que J&eacute;sus encouragerait quasi toutes les formes d'assistance que la s&eacute;curit&eacute; social garanti dans les pays nantis. Ce ne serait d'ailleurs pas seulement pour abolir la mis&egrave;re; ce serait aussi pour encourager certaines formes de g&eacute;n&eacute;rosit&eacute; qui d&eacute;pendent de ces garanties. Les volontaires (je ne parle pas ici des salari&eacute;s ou des &laquo;indemnis&eacute;s&raquo; des ONGs) qui oeuvrent aux chevets des souffrants dans les pays pauvres, proviennent en grande majorit&eacute; de pays qui poss&egrave;dent une bonne s&eacute;curit&eacute; sociale. (Ils sont, h&eacute;las, trop rares ceux qui donnerait quelques ann&eacute;es de leur vie &agrave; une mission charitable s'il n'avaient la certitude d'&ecirc;tre soign&eacute;s en cas de contamination ou d'avoir de quoi manger lorsqu'il rentreront chez eux...) Or il est manifeste que la charit&eacute; chr&eacute;tienne demande <a href="rel-eth-gentillesse-tab.htm#0" target="" >parfois autre chose</a> que ce que les professionnels de la charit&eacute; (salari&eacute;s et &laquo;indemnis&eacute;s&raquo;) peuvent offrir. En un mot, ce que l'<a href="../rel-citationsdicos/rel-ref-dicoperso.htm#hermeneutique" target="" >herm&eacute;neutique</a> des évangiles nous dit, c'est que la confiance en la providence n'est pas incompatible avec quelques investissements s&eacute;curitaires dont la s&eacute;curit&eacute; sociale est peut-&ecirc;tre le plus bel exemple. </p> </blockquote> <p>&nbsp; </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center">*</p> <p align="center"><a name="malhonnete"></a>Du gaspillage</p> <p align="center" class="petitpetit">ou</p> <p align="center"><span class="rougemaigre">Parabole de &quot;l'Intendant Malhonn&ecirc;te&quot;</span> .</p> <p>&nbsp;</p> <p>La parabole de &laquo;<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-intendantmalhonnete-tab.htm#0">L'Intendant Malhonn&ecirc;te</a>&raquo; (Lc16,1-14) a fait suer bien les moralistes qui devaient en rendre compte à leurs ouailles pantoises, perplexes, voire narquoises. Le Christ a élaboré ici l'une de ses plus étranges plaidoiries. Qu'importe l'étrangeté; ce qui est certain, c'est que par cette parabole, les avares, les idolâtres, les capitalistes «purs et méchants», et même la grande majorité des prodigues (car ils dépensent en général entre amis ou en famille) sont mis devant un mur. </p> <p>Voici l'intrigue du récit: </p> <blockquote> <p class="vertmaigre">Un gérant est viré par son patron parce qu'il &quot;dilapide&quot; ses biens. Belle voiture de fonction? hôtels de luxe? Vêtements griffés? Notes de frais exorbitantes?... Le texte ne précise pas et le reste de la parabole laisse juste entendre que ces dépenses ne favorisaient pas les liens du gérant avec son environnement humain; il n'a pas d'ami... Pire: il a probablement des ennemis puisque c'est par dénonciation que le patron apprend ces dépenses immodérées! </p> <p class="vertmaigre">Ce vide d'amour va mettre le gérant dans une position difficile dès qu'il n'aura plus de revenus. Pour parer à cet inconfort, il invente un tour de passe-passe qui va (peut-être!) lui permettre de se faire un ou des amis en dernière minute. Ce tour de passe-passe, c'est de faire des somptueuses remises de dettes aux débiteurs de son patron. C'est faisable puisqu'il garde la gestion pendant quelques jours encore, le temps de clôturer sa comptabilité... (Remarquons tout de même que dans cette combine, pas un sous de l'argent volé ne va directement dans sa poche. Quoi qu'il en ait encore la possibilité, ce gérant n'a pas choisit de remplir un compte en Suisse...) </p> <p class="vertmaigre">Une fois le méfait commis, contre toute attente, le patron félicite son gérant pour son attitude. Il n'est pourtant pas dupe de l'escroquerie énorme dont il fut la victime. Or ce patron est manifestement une figure de Dieu le Père! </p> </blockquote> <p>Le gérant de cette étrange parabole n'est manifestement pas congédié pour des erreurs &quot;techniques&quot; de gestion puisque le patron lui laisse encore quelques jours de gestion (<a href="../rel-citationsbible/3ser-tab.htm#162">Lc16,2</a>). Il gère probablement bien l'entreprise parce que si ce n'était pas le cas, le patron ferait valoir d'une manière ou l'autre que l'argent est compté, qu'il faut calculer (comme celui qui envisage de construire une tour fait préalablement un calcul des dépenses ou comme un roi qui part en guerre compte ses soldats -<a href="../rel-citationsbible/3tob-tab.htm#1427">Lc14,28-32</a>). Le rendement, c'est plutôt le sujet de la <a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-talents-tab.htm#0">parabole des talents</a> par exemple... Le patron ne reproche pas non plus à son gérant de négliger les pauvres (cela c'est le sujet de la parabole du pauvre Lazare -<a href="../rel-citationsbible/3ser-tab.htm#1618">Lc16,19-31- </a>par exemple). Jésus essaye manifestement de nous introduire ici dans une problématique où ces questions-là ne se posent plus et où l'argent est pléthorique... C'était d'ailleurs déjà le cas dans la parabole précédente -<a href="../rel-citationsbible/3ser-tab.htm#1510">Lc15,11</a>- où le père de l'enfant prodigue n'a soucis de voir la moitié de son bien partir en fumée). </p> <p>Le sujet de la parabole n'est donc pas la production, la rentabilité ou la distribution mais le bon ou le mauvais usage qui est fait de l'argent une fois toutes les obligations de bases assurées. Sur la bonne manière de dépenser l'argent pléthorique, ce texte est paradigmatique. </p> <p>L'intérêt du patron n'est pas en jeu et ce qu'il reproche à son gérant, c'est de mal gérer son propre intérêt! Cet imbécile semblait en train de se perdre dans des dépenses stupides alors qu'il n'avait même pas d'amis! La clé de cette étrange manière de juger l'acte de l'escroc se résume donc assez facilement: peu importe la dépense, pourvu que naisse une relation chaleureuse là où il n'y en avait pas. &quot;L'amour&quot; (amitié) que le gérant essaye de faire naître dans le coeur des débiteurs n'appartient pas à la sphère d'<a href="../rel-spir/rel-spirit-erosphileagape-tab.htm#agape">Agap&egrave;</a>, mais à celle de <a href="../rel-spir/rel-spirit-erosphileagape-tab.htm#philea">Philia</a>. Dans son propre coeur par contre, cette combine, par-delà son immoralité, est une porte d'entrée dans la sphère d'<a href="../rel-spir/rel-spirit-erosphileagape-tab.htm#agape">Agap&egrave;</a>, et c'est ce qui lui vaut l'éloge final. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Mettons les choses au point par rapport à l'Agapè. Agapè (l'amour inconditionnel), dans le jargon théologique chrétien contemporain (surtout après les travaux magistraux de Nygren), c'est l'Amour que Dieu éprouve pour les hommes. Agapè se confronte toujours d'une manière ou l'autre aux deux autres manières d'aimer qui furent conceptualisées sous les labels d'Éros (Cf. Platon...) et de Philia (Cf. Aristote...). C'est à tord que certains ont dit que l'Agapè promu par le Christ se distingue d'Éros et de Philia parce qu'il est désintéressé. Il peut l'être, mais Philia peut aussi l'être! La différence cruciale, c'est que pour naître, Agapè ne demande aucune sympathie préalable, aucun désir premier. Dans la sphère d'Agapè, l'aimant ne choisit pas l'aimé &quot;parce que&quot; c'est une femme, &quot;parce que&quot; c'est un enfant &quot;parce que&quot; c'est mon père, &quot;parce que&quot;, &quot;parce que&quot;... Agapè commence dans l'inconditionnalité alors que Philia ne devient inconditionnel qu'après une élection. (Dans la sphère de Philia, cette inconditionnalité ne commence d'ailleurs à être opérationnelle que lorsque tout &quot;tourne mal&quot;, lorsque l'épouse est atteinte d'Alzheimer, lorsque l'époux devient alcoolique, etc.). </p> <p class="turquoisemaigre">L'inconditionnalité première d'Agapè donne à cette figure de l'amour une portée sociale très spécifique et essentielle pour le christianisme qui l'utilise pour penser l'organisation du &quot;Royaume des Cieux&quot;, son &quot;utopie&quot; fondatrice. Ce que le Chrétien suppose, c'est qu'avec un germe d'Agapè, toute la méchanceté du monde est mise à mal parce que, lorsque ce germe croît, il conduit nécessairement à l'amour des ennemis, or nul, pas même un ennemi mortel, ne sort indemne d'avoir été aimé... </p> <p class="turquoisemaigre">En stricte logique, aimer son ennemi est une formule contradictoire. Elle renvoie donc sinon à une impossibilité, au mieux à un mystérieux oxymore. Mais sur le terrain ce n'est pas aussi compliqué; il arrive que l'on déteste son ennemi tout en l'aimant un tout petit peu malgré tout... En fait, j'ai déjà un pied dans la sphère d'Agapè si j'aime mon ennemi juste assez pour regretter de ne pas l'aimer davantage. Reconnaissons-le, cette situation de terrain est non seulement possible mais aussi relativement fréquente (heureusement!). </p> <p class="turquoisemaigre">Gardons donc bien en tête qu'en affaire d'amour, l'intensité de la relation ne préjuge pas de sa qualité. C'est une caractéristique qualitative de l'amour et non son intensité qui permet de distinguer Agapè de Philia et d'Éros. </p> <blockquote> <p class="petit">Pour plus de d&eacute;tails sur les diff&eacute;rences entre Eros Philia et Agap&egrave;, voir les divers <a href="../rel-menus/rel-epa-menu.htm" target="_top">articles d&eacute;di&eacute;s au sujet</a> dans ce m&ecirc;me site. </p> </blockquote> </blockquote> <p>Le pari relationnel que fait le gérant, par-delà les moyens qu'il utilise, l'introduit dans la sphère d'Agapè pour une raison précise: le gérant essaye de se faire aimer par des personnes vis-à-vis de qui il n'éprouve aucune sympathie préalable. Les débiteurs que le gérant essaye de séduire par sa turpitude n'éprouvent probablement rien de très positif à l'endroit de ce gérant; on peut supposer que ces débiteurs n'ont pas plus de sympathie pour lui que nous n'en aurions pour un huissier de justice... Et cette méfiance est probablement réciproque, car, que je sache, l'endettement n'a jamais été la caractéristique la plus séduisant d'une personne. En plus, ces débiteurs (parmi lesquels se trouve peut-être le dénonciateur), acceptent sans difficulté d'entrer dans la félonnerie, ce qui, a priori, les rend encore moins sympathiques... </p> <p>Cette étrange parabole laisse entendre que l'inconditionnalité de celui qui voudrait être aimé ne s'identifie pas à l'absence d'autres d'intérêts dans la relation. Cela signifierait que les joies relationnelles les plus sublimes ne sont pas toujours incompatibles avec le plaisir plus rustique de l'amour sexuel, ou de l'intérêt financier, ou que sais-je d'autre encore. </p> <p>En termes purement économiques, pour le patron, l'escroquerie est une perte sèche. Si par l'escroquerie, les débiteurs commencent à éprouver de la sympathie pour l'intendant, tant mieux pour l'intendant et tant pis pour le patron... Mais le Christ fait valoir par cette parabole une priorité inattendue: ce patron-là, dans ce contexte-là en tout cas, s'en fout du gaspillage des ressources, simplement parce qu'il y a de l'autre côté de la balance le germe de cet amour inconditionnel! Ce qui l'intéresse avant tout, lui, le patron des patrons, c'est la promotion de cette inconditionnalité-là! Il apprécie l'acte du gérant non pas parce qu'il est une escroquerie, mais parce qu'il essaye pour une fois de se rendre aimable lui qui ne l'était pas! Mieux! Il essaye d'être aimé par des personnes qui au départ ne lui plaisent pas et qui sont peut-être même plutôt des ennemis! </p> <p>Pourquoi éprouvons-nous sinon un malaise au moins un trouble après la lecture d'un tel texte? Pour moi, la réponse à cette question va de soi: comment pourrais-je accepter que le Christ fasse l'éloge de ce gérant alors que manifestement ce n'est PAS par amour que le gérant distribue l'argent volé, mais par calcul! Le gérant n'aime pas les débiteurs lorsqu'il leur donne l'argent volé, et il ne cherche même pas à les aimer. Il ne cherche qu'à se faire aimer, ce qui n'est pas la même chose. Il cherche un profit en se faisant aimer. Il instrumentalise l'amour et cela ne semble pas gêner Jésus! Voilà ce qui me choque! </p> <p>Le Christ me répond alors qu'essayer de susciter une sympathie là où règne la réserve voire l'inimitié, que cela me plaise ou non, c'est un premier pas dans la sphère d'Agapè. Il n'y a d'ailleurs pas d'autre moyen d'entrer dans cette sphère! Essayer de se faire aimer par quelqu'un qui suscite en nous désir ou sympathie est une stratégie érossienne ou philéique, ce n'est pas mal, mais cela n'a rien de spécifiquement chrétien et n'autorise probablement pas des licences morales de cette ampleur. Mais essayer de se faire aimer par des personnes qui ne me sont pas sympathiques voire par de francs ennemis, c'est autre chose! Et à bien y regarder, cet &quot;autre chose&quot;, c'est déjà un peu d'amour et c'est même déjà un peu d'Amour divin! </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Jouons un peu, à titre d'exercice, avec les concepts d'Éros, Philia et Agapè pour déconstruire plus encore la strat&eacute;gie du gérant: </p> <p class="turquoisemaigre">La manoeuvre op&eacute;r&eacute;e par le gérant est cynique; son but, c'est de se faire aimer d'un amour philéique et non érossien parce qu'il sait bien que seule une 'vraie amitié' (Philia) est susceptible de pourvoir à ses besoins en cas de disette. Mais pour obtenir qu'au moins une personne l'aime d'amour philéique dans un milieu plutôt hostile au départ, il faut procéder par étapes. D'abord, il faut rappeler, réveiller ou susciter une sympathie érossienne, car il n'y a pas d'élection amicale (Philia) sans sympathie érossienne première. Afin de favoriser l'émergence de cette indispensable sympathie, le gérant se donne donc aux pulsions purement érossiennes de ses proies: il les aide à &eacute;veiller (ou réveiller) et à assouvir des désirs prosaïques voire sordides (ici, l'effacement de dettes... Mais on pourrait très bien imaginer dans un autre contexte une femme intéressée qui retire son soutien gorge devant un homme vis-à-vis duquel elle n'éprouve aucune sympathie; cette femme obtiendrait probablement aussi le support du Christ si sa démarche était manifestement utile pour semer de l'amour inconditionnel dans le monde!). </p> <p class="turquoisemaigre">Il n'est pas idiot ce gérant qui ne surévalue pas le coeur de ses proies! Il a bien assumé que c'est Éros qu'il faut réveiller et flatter pour susciter l'une ou l'autre sympathie digne d'intéresser Philia. En pratique, remuer ce genre de désirs plus ou moins conscients et plus ou moins avouables, c'est l'unique moyen de gagner une place dans un coeur lorsque l'on n'a ni beauté, ni charme, ni proximité clanique, ni attrait sexuel à faire valoir. Le gérant a bien compris cette mécanique du coeur que tout le monde devrait savoir: une sympathie précède tout amour philéique. L'amour érossien gère à sa manière des désirs (ou même des besoins). Ce n'est que dans un deuxième temps que ces désirs et besoins plus ou moins bien gérés par Éros suscitent, éventuellement, un intérêt dans la sphère de Philia qui en soutirera un engagement, une confiance dans et malgré le temps... </p> </blockquote> <p>Si j'examine le coeur du gérant qui essaye de manipuler le coeur de ses proies, je ne repère aucune sympathie relationnelle plus ou moins frustrée mais le besoin de prolonger un certain niveau de vie. Il possède déjà l'objet de son désir et c'est la prolongation de sa possession qu'il vise maintenant! On n'est donc pas clairement dans une problématique érossienne, car cette dernière, tant qu'elle reste dans la sph&egrave;re de l'amour vise toujours des personnes, (chosifiées peut-&ecirc;tre, mais des personnes quand même!). Le critère d'élection de ses proies , n'est pas non plus une affinité, une attirance personnelle pour une personne singulière mais l'endettement de plusieurs personnes. On n'est donc loin d'une élection philéique née d'une sympathie personnelle. Dans toute cette affaire, le gérant semble donc d'abord être carrément hors de la sphère de l'amour. Dans son chef, pas d'envie, pas de goût orienté vers qui que ce soit... </p> <p>Il est manifeste que si le gérant rejoint le seuil de la sphère d'Agapè comme le sous-entend le Christ en fin de parabole, alors c'est malgré lui, involontairement, accidentellement! En fait, le gérant fait un pari typiquement agapique, mais qui n'a rien, absolument rien, de vertueux. (La seule vertu du gérant, c'est d'avoir fait ce choix tactique-là plutôt que de remplir un compte en Suisse!). On est bien dans un pari puisqu'il ne peut ni être certain du résultat ni prévoir lequel des débiteurs de son patron mordra à l'hameçon! </p> <p>C'est évidemment sur ce point précis que la leçon du Christ devient passionnante; il nous dit ici rien de moins que l'accessibilité de l'Agapè! Agapè est accessible même au minable! Pour commencer avec l'Agapè, il n'est pas demandé d'aimer! Il n'est exigé que d'accepter d'être aimé par n'importe qui. La théorie sous-jacente c'est qu'accepter, ou, mieux encore, vouloir être aimé par n'importe qui, même le plus ignoble des criminels, suffit pour être justifié car la suite viendra spontanément... peut-être pas à tout les coup, parce que cela ne dépend pas que de Dieu, mais parfois, et c'est déjà très bien. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Cette manière de comprendre l'amour, la psychologie contemporaine l'assume pleinement. Aujourd'hui, aucun psychologue digne de ce nom ne niera que la qualité d'amour qui nourrit la vie d'une manière pérenne soit le fruit d'un long processus de maturation dont le principal carburent est l'amour reçu et non l'amour donné. Le Christ, qui avait bien compris cela il y a deux mille ans, en avait fait le sujet de plusieurs prêches dont la plus fameuse est la parabole du Bon Samaritain (<a href="../rel-exeg/rel-exeg-intro-tab.htm#txt">cette lecture-là du &quot;bon Samaritain&quot;</a> s'essoufflait lorsque Françoise Dolto l'a génialement réhabilitée, ce qui indique bien la compatibilité de cette intuition avec la modernité!). </p> </blockquote> <p>Le Christ avait bien compris que ce qui complique la maturation de l'amour, c'est la possibilité qu'a tout homme non pas de refuser d'aimer (on ne choisit pas d'aimer!!!!) mais de refuser d'être aimé (cela, on est peut-être en mesure de le choisir!)... </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">À partir d'une telle thèse, il y a quelques urgences pédagogiques à faire valoir en matière d'amour: </p> <p class="turquoisemaigre">&#149;&nbsp; D'abord et avant tout, il faudrait promouvoir une forme d'introspection qui nous permettrait de ne pas &quot;passer à côté&quot; de l'amour reçu gratuitement, savoir le reconnaître partout et tout le temps, même dans ses manifestations de faible intensité: le sourire d'un passant, une politesse inattendue, votre femme avec qui vous venez de vous disputer, mais qui redresse tout de même le col de votre chemise avant de vous laisser partir au travail... Cette conscientisation est fondamentale puisqu'elle est le carburent par lequel vous serez à votre tour en mesure d'aimer inconditionnellement... </p> <p class="turquoisemaigre">&#149;&nbsp; Ensuite, il faudrait promouvoir une introspection suffisamment déparasitée des scories du narcissisme pour permettre le diagnostic d'une réelle carence d'amour reçu, car alors on désirera être aimé et le reste viendra de surcroît... Cette introspection, c'est ce que le gérant de la parabole fait et qui le conduit à reconnaître enfin qu'il n'est pas aimé et que cela peut lui nuire. (Souvent, si un homme refuse d'être aimé, c'est à cause de l'effet rétroactif d'un échec d'une tentative d'aimer. Qu'il suffise alors de bien comprendre que refuser d'aimer à nouveau, ce n'est pas la même chose que refuser d'être aimé! Dans cette deuxième figure, il n'y a jamais d'échec à craindre!) </p> </blockquote> <p>Dans cette parabole, lorsqu'il félicite son gérant qui vient de le voler pour se faire des amis, le patron fait lui-même montre d'un véritable mépris pour l'argent, ce «Mamon de l'injustice» (cette idole des tordus). Une fois que l'argent est pléthorique, qu'importent les morales de comptables! Tordez autant que vous le pourrez ce torchon pour en extraire jusqu'à la dernière goutte si cette goutte puante et méprisable à quelque pouvoir de vous aider à vous faire aimer par ceux qui ne vous aimaient pas! </p> <blockquote> <p class="vertmaigre"><em>&quot;...Le maître félicita l'intendant injuste, parce qu'il avait agi en homme avisé. Car les gens de ce monde sont plus avisés dans leurs rapports à leurs semblables que les fils de la lumière. Eh bien, moi, je vous dis: Faites-vous des amis avec le Mamon de l'injustice, pour que, quand il fera défaut, ils vous accueillent dans les demeures éternelles. Celui qui est digne de confiance dans une petite affaire est aussi digne de confiance dans une grande, et celui qui est injuste dans une petite affaire est aussi injuste dans une grande...&quot; </em></p> </blockquote> <p>Le Christ dit ici que les &quot;fils de la lumière&quot; ont trop tendance à mettre de la morale là où elle n'a plus lieu d'être. Et l'on comprend alors l'embarras des moralistes! La dignité et la justice, ce serait donc de mépriser le plus élémentaire droit de propriété? Oui, mais il faut avoir préalablement aussi lu que &quot;se faire des amis&quot; ce n'est pas graisser la patte de ceux que l'on a déjà, ce n'est pas se rendre plus sympathique vis-à-vis de ceux qui nous sont déjà sympathiques! Cette justice qui se donne le droit de mépriser la propriété fait un avec celle qui privilégie l'émergence de l'amitié au sein de l'inimitié, ce qui, tout le monde en conviendra est une autre affaire! Les &quot;petites affaires&quot;, ce sont les affaires liées à l'argent pléthorique. Les &quot;grandes affaires&quot; sont les gestions de l'amour et la haine. Mal gérer les &quot;petites affaires&quot;, c'est ne pas les mettre au service des grandes! L'indignité qui détruit toute confiance, c'est d'avoir osé croire qu'il y avait dans l'argent des valeurs qui passaient avant le scandale de l'inimitié! </p> <blockquote> <p class="vertmaigre"><em>&quot;...Si donc vous n'avez pas été dignes de confiance avec le Mamon injuste, qui vous confiera le bien véritable? Et si vous n'avez pas été dignes de confiance pour ce qui appartenait à quelqu'un d'autre, qui vous donnera votre propre bien? Aucun domestique ne peut être esclave de deux maîtres. En effet, ou bien il détestera l'un et aimera l'autre, ou bien il s'attachera à l'un et méprisera l'autre. Vous ne pouvez être esclaves de Dieu et de Mamon...&quot; (Lc 16,12-13) </em></p> </blockquote> <p>Les biens matériels pléthoriques que Dieu laisse couler dans nos mains sont une grâce reçue, jamais un mérite. Le &quot;possédant&quot; n'est que le gestionnaire d'une grâce. Le gestionnaire qui penserait que l'argent posséderait en lui sa justification, la règle de son bon usage, est perdu... Gestionnaires, nous le sommes déjà quasi tous. Mais nous pouvons choisir le patron. Il nous reste à choisir le bon, c'est-à-dire l'amour inconditionné! Tant pis pour l'argent gaspillé si c'est pour servir cette cause-là! </p> <p>&nbsp; </p> <p align="left" class="petit">paul yves wery - Chiangmai</p> <blockquote> <p align="justify" class="petit">La version 2.0 de la parabole a &eacute;t&eacute; r&eacute;vis&eacute;e en juillet 2013, mais le reste de l'article sur l'argent et la pauvret&eacute; dans les évangiles n'a pas &eacute;t&eacute; chang&eacute;. </p> </blockquote> <p align="center">&nbsp;</p> <p align="center">*</p> <p align="center"><a name="luxe" id="luxe"></a>J&eacute;sus et le luxe</p> <p align="center" class="rougemaigre">&quot;Des perles rares et de l'onction de B&eacute;thanie&quot;</p> <p align="center">* </p> <!-- pywcomfort====var --> <p>Le luxe, avec la splendeur de son inutilit&eacute;, non seulement n'est pas condamn&eacute; en soi par J&eacute;sus mais il est m&ecirc;me accept&eacute; comme un id&eacute;al (un engagement que les liturgistes de certaine Eglise exploiteront jusqu'en leurs plus sublimes exc&egrave;s). </p> <p>Dans le Texte proprement dit, je n'ai rep&eacute;r&eacute; que deux passages o&ugrave; la question du luxe est explicitement soulev&eacute;e : </p> <blockquote> <p>&#149;&nbsp; J&eacute;sus &eacute;tait tr&egrave;s bien v&ecirc;tu (<a href="../rel-citationsbible/4tob-tab.htm#1922" target="" >Jn19,23</a>) </p> <p>&#149;&nbsp; Malgr&eacute; la demande expresse de certains de ses disciples, J&eacute;sus n'a finalement pas condamn&eacute; la d&eacute;pense folle de Marie de B&eacute;thanie. (<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-onctionbethanie-tab.htm#0" target="" >Onction de B&eacute;thanie</a>) </p> </blockquote> <p>La philologie ici ne nous permet pas de tergiverser sur le sens des mots. Ces deux passages ne sont &eacute;videment que peu de chose au regard des nombreuses condamnations de la mis&egrave;re. On pourrait donc &ecirc;tre tent&eacute; de ne pas y accorder d'importance puisque le luxe, par son inutilit&eacute;, semble incompatible avec l'existence d'indigents. On pourrait imaginer, par exemple, que la belle tunique venait d'&ecirc;tre offerte &agrave; J&eacute;sus, un peu malgr&eacute; lui, par une riche d&eacute;vote et qu'&agrave; B&eacute;thanie, c'est par piti&eacute; pour la pauvre Marie (que tout le monde accablait) que J&eacute;sus n'a pas condamn&eacute; sa folle d&eacute;pense... </p> <p>La question devient plus embarrassante lorsque l'<a href="../rel-citationsdicos/rel-ref-dicoperso.htm#hermeneutique" target="" >herm&eacute;neutique</a> fait valoir que si J&eacute;sus n'avait pas aim&eacute; le luxe pour lui-m&ecirc;me, sa mani&egrave;re de parler aurait &eacute;t&eacute; diff&eacute;rente. Les &eacute;vangiles sont truff&eacute;s de m&eacute;taphores qui pr&eacute;supposent des vertus indiscutables au luxe. (Indiscutables et d'ailleurs indiscut&eacute;es en dehors de l'&eacute;pisode de l'onction de B&eacute;thanie!) M&ecirc;me lorsqu'Il veut nous faire valoir la beaut&eacute; d'une simple fleur des champs, J&eacute;sus en r&eacute;f&egrave;re au luxe dont le Roi Salomon, le roi b&eacute;ni entre tous, semblait &ecirc;tre un amateur imp&eacute;nitent (<a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-providence-tab.htm#0" target="" >&quot;Providence&quot;</a>). </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Je mentionne volontiers ce passage parce qu'il pr&eacute;figure d&eacute;j&agrave; &agrave; lui seul la subtilit&eacute; de la th&eacute;ologie du luxe: il s'agit finalement autant de retrouver les caract&eacute;ristiques du luxe dans n'importe quelle parcelle de la cr&eacute;ation –ici la fleur des champs– que de remarquer la parcelle luxueuse du lot commun... </p> </blockquote> <p>La perle pr&eacute;cieuse est la m&eacute;taphore la plus manifestement luxueuse utilis&eacute;e par J&eacute;sus pour d&eacute;crire le Royaume <a href="../rel-citationsbible/1tob-tab.htm#1344" target="" >(Mt13,45-46</a>). L'ambigu&iuml;t&eacute; de cette m&eacute;taphore est port&eacute;e &agrave; son comble si l'on veut bien se rappeler que J&eacute;sus, un tout petit peu plus t&ocirc;t, nous disait: &laquo;<em class="vertmaigre">...ne jetez pas vos perles devant les cochons, de peur qu'ils ne les pi&eacute;tinent et ne se retournent contre vous pour vous lac&eacute;rer...</em>&raquo; (Mt7,6 traduction &quot;Nouvelle Bible de S&eacute;gond&quot;). Voil&agrave; une mise en garde somme toute tr&egrave;s aristocratique! Le Royaume et la perle pr&eacute;cieuse auraient donc en commun cette valeur prestigieuse qui oblige, qui exige, la dignit&eacute; de celui qui l'aborde? Or nous savons que si la perle a effectivement quelques m&eacute;rites qui nous obligent, c'est parce qu'elle est belle, non n&eacute;cessaire, rare et co&ucirc;teuse: quatre caract&eacute;ristiques typiques du luxe. </p> <p>Il faut revenir sur chacune de ces quatre caract&eacute;ristiques parce qu'il faut emp&ecirc;cher le profane de confondre le luxe et ce que le snob ou l'imb&eacute;cile en fait. Le luxe n'est pas inh&eacute;rent &agrave; tel ou tel objet, il est une qualit&eacute; accidentelle qui na&icirc;t dans et par le regard d'une personne appartenant &agrave; une culture qui en convient. Mettre une perle au cou d'une dame peut avoir la dignit&eacute; d'une liturgie luxueuse alors qu'incruster la m&ecirc;me perle dans la poign&eacute;e du frigidaire a tr&egrave;s peu de chance de sortir du mauvais go&ucirc;t ou de la vulgarit&eacute;... Si cette nuance n'est pas parfaitement assum&eacute;e, il est impossible de comprendre pourquoi certaines Eglises chr&eacute;tiennes, qui se veulent pourtant aussi charitables que les autres, ont une pratique syst&eacute;matis&eacute;e du luxe: encens, cath&eacute;drales, pat&egrave;nes d'or fin... </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center" class="noirgras">*Inutilit&eacute;.* </p> <p>L'inutilit&eacute; de la perle enrichit consid&eacute;rablement le sens de la m&eacute;taphore &eacute;vang&eacute;lique. Cette inutilit&eacute; d&eacute;clare l'ind&eacute;pendance du Royaume par rapport aux n&eacute;cessit&eacute;s qui nous asservissent et nous accablent depuis notre naissance. </p> <p>Le luxe n'est luxe que s'il submerge l'utile et si l'on peut &agrave; tout instant s'en passer... Dans la prise en compte de la pr&eacute;ciosit&eacute; de la perle, il y a donc l'exploitation d'une forme de libert&eacute;. </p> <p>Pour un roi, la couronne charg&eacute;e d'histoire dont il se couvre aux grandes c&eacute;r&eacute;monies n'est pas un objet luxueux mais un langage, un outil symbolique attach&eacute; &agrave; sa profession de roi. Pour un collectionneur par contre, la possession de cette m&ecirc;me couronne charg&eacute;e d'histoire et dont il garnirait son salon devient un luxe parce que ce collectionneur assume une passion facultative, choisie, et c'est bien ce type-l&agrave; de relation que J&eacute;sus voudrait nous voir entretenir avec le <a href="../rel-spir/rel-spirit-erosphileagape-tab.htm#agape" target="" >Royaume d'Agap&egrave;</a>. </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center" class="noirgras">*Raret&eacute;.* </p> <p>Une perle est d'autant plus luxueuse qu'elle est rare... La raret&eacute; pouss&eacute;e &agrave; son comble, c'est la singularit&eacute;. Avec la perle &eacute;vang&eacute;lique, on touche &agrave; ce respect infini que J&eacute;sus &eacute;prouve pour la singularit&eacute;. Son Royaume est singulier de bout en bout non seulement par l'unicit&eacute; de son Dieu mais aussi par la singularit&eacute; absolue et reconnue de chacun de ses sujets. </p> <p>Ce culte de la singularit&eacute; a quelque chose &agrave; voir avec l'importance accord&eacute;e &agrave; la contemplation. Lorsqu'un ma&icirc;tre spirituel –qu'il soit chr&eacute;tien ou non d'ailleurs– contemple par exemple une fleur, il la singularise, il cherche en elles non plus le genre et l'esp&egrave;ce mais le cœur de cette fleur-l&agrave;, sujet unique et irrempla&ccedil;able qui partage son pr&eacute;sent... Cette lucidit&eacute;, J&eacute;sus en fait vraiment l'atmosph&egrave;re de son Royaume. Dans cet univers, il n'y a plus de &quot;choses&quot; mais autant de sujets uniques. Il n'y a plus des hommes mais des personnes. La raison en est simple: le culte de la singularit&eacute; a aussi quelque chose &agrave; voir avec la reconnaissance de l'alt&eacute;rit&eacute;. Qui donc pourra reconna&icirc;tre l'ampleur du myst&egrave;re de l'autre s'il n'est pr&eacute;alablement en mesure d'identifier la raret&eacute; et puis carr&eacute;ment la singularit&eacute; d'un objet quelconque? Il y a dans la reconnaissance et le respect de la raret&eacute; le germe de la th&eacute;ologie de l'alt&eacute;rit&eacute;; on est de nouveau aux racines de l'amour agapique, le Graal du Christianisme. </p> <p>&nbsp; </p> <p align="center" class="vertgras">*Le prix.* </p> <p>Tout ce qui est inutile et rare ne peut pas &ecirc;tre consid&eacute;r&eacute; comme luxueux. Il ne faudrait pas faire de n'importe quelle assiette d&eacute;corative un objet de luxe. Le luxe demande une valorisation culturelle particuli&egrave;re. Il faudra que l'assiette soit une authentique porcelaine de Delft par exemple. Le luxe est toujours redevable d'une d&eacute;signation culturelle. Et si cette valorisation culturelle d'un objet est absente, pour que cet objet entre dans la sph&egrave;re du luxe, il faudra modifier non seulement le sujet qui s'y int&eacute;resse mais la culture &agrave; laquelle le sujet appartient. Or, d&egrave;s qu'il est question d'appartenance culturelle et d'un travail sur une culture, il est aussi question d'initiation (voire d'un rude &eacute;colage) et d'engagement dans l'action. </p> <p>En d&eacute;pit du risque de se voir tax&eacute; d'aristocratisme, on comprend pourquoi J&eacute;sus nous rappelait que la perle n'a pas &agrave; &ecirc;tre donn&eacute;e aux porcs. Ce n'est pas que le porc soit m&eacute;prisable, mais le porc ne voit encore que du verre teint&eacute; dans la perle et pourrais donc faire mal sans mal y voir. Il y a donc encore et toujours cet encouragement &agrave; affiner nos <a href="../rel-bud/rel-bud-symbole%20et%20langage-tab.htm#0" target="" >discriminations symboliques</a>.</p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">C'est ici que le profane trouvera le moyen de distinguer l'homme assum&eacute;, le snob et l'imb&eacute;cile. C'est ici que la perle dans la poign&eacute;e du frigidaire peut devenir ridicule; une culture, d'o&ugrave; qu'elle soit d'ailleurs, lorsqu'elle s'affine, n'autorise plus tous les mariages symboliques. Le luxe r&eacute;clame un certain type de concentration mentale qui s'accommode mal de cet &eacute;tat d'esprit qui nous conduit au frigidaire. </p> </blockquote> <p>Ce travail &agrave; la fois personnel et culturel est quasi toujours long et co&ucirc;teux. Mais l'av&egrave;nement du Royaume est impossible sans cet affinement des diverses cultures qui l'habitent, sans l'&eacute;laborations de nouveaux contrats de cohabitation, ...en un mot, sans la prise en charge de la dimension horizontale de la spiritualit&eacute;. Il n'y a pas d'aristocratisme qui tienne ici parce qu'aucune naissance ni aucune nature ne garantit absolument l'essentiel qui est affaire de maturit&eacute;. </p> <p>Le luxe est au bout de la course. Qu'on le veuille ou non, pour un chr&eacute;tien, le luxe est aussi un id&eacute;al r&eacute;gulateur, qu'on soit de gauche ou de droite, pauvre ou riche, intelligent ou simple... J&eacute;sus a toujours fait valoir que l'homme des n&eacute;cessit&eacute;s n'est qu'un tremplin vers l'homme <a href="../rel-exeg/rel-exeg-resurrection-tab.htm#0" target="" >ressuscit&eacute;</a>; l'acc&egrave;s &agrave; cette b&eacute;atitude passera n&eacute;cessairement par la valorisation culturelle de l'inutile et du rare. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Pas de nivellement par le bas! C'est faire œuvre satanique que de refuser de lever les yeux. Dieu est au fa&icirc;te du Temple et il ne faut pas qu'il en descende.&nbsp;Il y a effectivement moyen d'abolir toute mis&egrave;re en m&eacute;canisant l'humanit&eacute; enti&egrave;re sous les r&egrave;gles de la causalit&eacute;; mais les évangiles nous mettent en garde d&egrave;s ses premi&egrave;res page car quel sens donner &agrave; la description de la <a href="../rel-exeg/rel-exeg-tentation2-tab.htm#0" target="" >deuxi&egrave;me tentation</a> de J&eacute;sus au d&eacute;sert sinon cette mise en garde-l&agrave;! Si J&eacute;sus avait condamn&eacute; la pauvret&eacute; avant d'avoir promu le bon go&ucirc;t et la libert&eacute; –en d'autres mots, s'Il avait donn&eacute; raison &agrave; Judas contre Marie de B&eacute;thanie– insidieusement, Il aurait aussi condamn&eacute; le monde &agrave; croupir dans sa nature premi&egrave;re... Il aurait condamn&eacute; le genre humain &agrave; se complaire et &agrave; d&eacute;plaire dans ses propres odeurs comme le font les cochons. Dans l'industrie co&ucirc;teuse du nard, il faut lire ici le souci de sublimer la nature comme on distille une liqueur ou comme on soigne une maladie. </p> </blockquote> <p>&nbsp; </p> <p align="center" class="vertgras">*Le beau.* </p> <p>Toutes choses &eacute;tant &eacute;gales par ailleurs, le bel objet est plus luxueux que celui qui ne l'est pas. Cette beaut&eacute; axiologiquement neutre est aussi &agrave; prendre en consid&eacute;ration. La beaut&eacute; poss&egrave;de une caract&eacute;ristique qui int&eacute;resse &eacute;norm&eacute;ment le Royaume: elle transcende toutes les cultures tout en s'incarnant dans et par une seule culture. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">C'est m&ecirc;me vrai pour la beaut&eacute; dite &laquo;naturelle&raquo;; que l'on songe pour s'en convaincre &agrave; ce que fit le romantisme pour la valorisation des montagnes en Occident! Les montagnes ne furent d'abord consid&eacute;r&eacute;es que comme des sources de pierres, de gibier et de fatigues. Ce ne sont que quelques cultures qui surent voir en elles, &agrave; l'instar du firmament, une source d'inspiration pour d'abyssales r&ecirc;veries sur la vastitude. </p> </blockquote> <p>La Mosqu&eacute;e Bleue d'Ispahan est incroyablement belle, m&ecirc;me pour celui qui n'entend rien &agrave; l'Islam, pourvu qu'il ait au moins acquis dans sa propre culture un minimum de maturit&eacute;. La Mosqu&eacute;e Bleue peut m&ecirc;me devenir pour le profane l'indiscutable preuve que cette religion est capable de susciter une culture sublime. Pour l'homme culturellement m&ucirc;r, cette religion poss&egrave;de donc en elle les germes d'une somptuosit&eacute; universelle. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Les Islamiste de l'Iran Khomeynistes l'ont d'ailleurs bien compris qui jamais n'ont interdit aux visiteurs, toutes religions confondues, d'entrer dans cette splendeur &agrave; l'&eacute;tat brut! </p> </blockquote> <p>On peut comprendre alors pourquoi certaines Églises chr&eacute;tiennes ont refus&eacute; d'entrer dans un jeu trop rigoureux, trop froid, auquel un certain protestantisme les invitait (pour des raisons par ailleurs aussi tr&egrave;s valables). C'est une question de style dans la mani&egrave;re de tendre &agrave; l'universel. C'est aussi une question de cr&eacute;dibilit&eacute;. Mais c'est surtout une mani&egrave;re de susciter un int&eacute;r&ecirc;t pour un nouveau Royaume en ce bas monde des n&eacute;cessit&eacute;s. Temples splendides, &eacute;toffes onctueuses, parfums profonds, sublimes chorales... toujours la m&ecirc;me arme: cette beaut&eacute; qui affole nos sens sans nous briser! J&eacute;sus a vu qu'il y avait en elle quelque chose &agrave; prot&eacute;ger. <a href="../rel-spir/rel-spirit-erosphileagape-tab.htm#eros" target="" >Eros</a> n'est pas incompatible avec Agap&ecirc;!</p> <p>On comprend donc pourquoi il n'a pas condamn&eacute; la bourde de Marie &agrave; B&eacute;thanie lorsqu'elle d&eacute;pensait en parfum l'&eacute;quivalent d'un an de salaire au nez et &agrave; la barbe des pauvres qui croupissaient en face du balcon. Certes, J&eacute;sus &eacute;tait mal &agrave; l'aise; l'initiative de Marie &eacute;tait pour le moins maladroite. Tout qui sait lire entre <a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-onctionbethanie-tab.htm#0" target="" >les lignes </a> ressent ce malaise du Christ qui essaye tant bien que mal &agrave; la fois de ne pas blesser Marie, de ne pas ravaler par une sentence malheureuse le luxe &agrave; un simple caprice insens&eacute; et de ne pas contredire les arguments tout &agrave; fait pertinents des disciples scandalis&eacute;s (Judas n'&eacute;tait pas le seul &agrave; s'indigner si l'on en croit <a href="../rel-citationsbible/1oty-tab.htm#266" target="" >Mt26,8</a>). Tout qui rentre dans ce malaise de J&eacute;sus &agrave; cet instant-l&agrave; comprend aussit&ocirc;t la somptueuse subtilit&eacute; et la somptueuse complexit&eacute; du Royaume propos&eacute;. </p> <p>On sait combien cette histoire va mal se terminer puisqu'elle va d&eacute;cider Judas &agrave; arr&ecirc;ter &laquo;<a href="../rel-exeg/rel-exeg-judas-tab.htm#onction" target="" >l'affaire J&eacute;sus</a>&raquo;. Il &eacute;tait possible pour J&eacute;sus de s'engager autrement en acceptant de blesser Marie mod&eacute;r&eacute;ment (tout comme il avait bless&eacute; sa sœur auparavant&nbsp;qui n'avait pourtant pas &eacute;t&eacute; maladroite– <a href="../rel-citationsbible/3oty-tab.htm#1037" target="" >Lc10,38-42</a>). &Agrave; cause de Judas, J&eacute;sus a &eacute;t&eacute; forc&eacute; de s'engager dans une alternative qui &eacute;tait purement et simplement grossi&egrave;re. Nonobstant l'omnipr&eacute;sence des indigents &agrave; cette &eacute;poque, il &eacute;tait impossible pour J&eacute;sus de nous laisser croire qu'il condamnait en soi l'usage d'un parfum pr&eacute;cieux. Un tel parfum, c'est comme la Mosqu&eacute;e Bleue d'Ispahan, ou les temples d'Angor ou m&ecirc;me les pyramides du Caire: un pont qui r&eacute;concilie par-del&agrave; les diversit&eacute;s culturelles. Le beau rassemble en suscitant le respect, l'admiration et d'autre attitudes vertueuses qui sont toujours des tremplins vers l'amour agapique. </p> <p>Il faut toujours, toujours, toujours, trouver des moyens pour &quot;d&eacute;border&quot; des cultures sans les abolir. C'est par excellence ce que r&eacute;ussit la beaut&eacute; en g&eacute;n&eacute;ral et le luxe en particulier. De tels outils, il n'y en a pas assez pour qu'on puisse les n&eacute;gliger sans d'abord calculer le prix de cette n&eacute;gligence. Le prix &agrave; payer pour une promotion du Royaume sans le recours au luxe est parfois tout aussi exorbitant que le luxe lui-m&ecirc;me. Je ne pense pas que les initiateurs de la construction des cath&eacute;drales de France se soient tromp&eacute;s alors que la mis&egrave;re &eacute;tait terrible et omnipr&eacute;sente au moyen-&acirc;ge. Mais je ne pense pas non plus que la voie choisie par ces tendances eccl&eacute;siales sobres qui m&eacute;prisent le luxe soient moins chr&eacute;tiennes. </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre">Ce ne sont d'ailleurs pas tant les cath&eacute;drales qui firent bouillir Luther et sa descendance spirituelle qu'un clerg&eacute; imb&eacute;cile et snob voire concupiscent. </p> </blockquote> <p>La subtilit&eacute; &agrave; reconna&icirc;tre et assumer est celle-ci: l'onction de B&eacute;thanie ne donne des droits au luxe que si l'on veut bien aussi se rappeler &agrave; quel point elle mit J&eacute;sus mal &agrave; l'aise! </p> <blockquote> <p class="turquoisemaigre ">Pour donner plus d'&eacute;toffe historique &agrave; cette analyse remarquons qu'elle rend bien compte de la <a href="../rel-citationsbible/rel-ref-bi-onctionbethanie-tab.htm#0" target="" >diversit&eacute;</a> des r&eacute;dactions qui retracent cet &eacute;pisode. Les trois premiers &eacute;vang&eacute;listes ne cite pas nomm&eacute;ment Marie. L'onction fut tellement lourde en cons&eacute;quences (trahison de Judas), qu'il fut bien normal que Luc ait m&ecirc;me jug&eacute; pr&eacute;f&eacute;rable d'en donner une version plus symbolique encore pour la d&eacute;coller mieux du pr&eacute;nom d'une croyante bien identifi&eacute;e qui animait probablement encore les communaut&eacute;s primitives. Marie avait &eacute;t&eacute; maladroite mais manifestement bien intentionn&eacute;e et Marie vivait peut-&ecirc;tre encore au moment des premi&egrave;res r&eacute;dactions de ces r&eacute;cits. Mais elle ne vivait certainement plus lorsque le vieux Jean fit la deuxi&egrave;me r&eacute;daction de son évangile! (Cf <a href="../rel-exeg/rel-exeg-jean-tab.htm#0" target="" >&eacute;tude historique sur Jn</a>)... Jn est donc le seul &agrave; avoir pu la citer nomm&eacute;ment sans la blesser ...ce qui n'&eacute;tait pas inutiles pour d'autres raisons spirituelles: les contemplatifs occidentaux savent tous que Marie de B&eacute;thanie offre au christianisme de solides ouvertures vers les spiritualit&eacute;s plus &quot;orientale&quot;.</p> </blockquote> <p>paul yves wery - Chiangmai - Octobre 2010</p> <p class="petitpetit">Version 1.02 - Janvier 2011</p> <p class="petitpetit">Version 1.03 - juillet 2013 </p> <p>&nbsp;</p> <p>&nbsp;</p> </div> </td> </tr> </table >