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Version 1.02 - Juillet 2014

 

"NOLI ME TANGERE" ("Ne me touche pas") (Jn20,17)

Abstract: La présence n'est pas la proximité, l'absence n'est pas l'éloignement, l'être n'est pas la présence ...

 

Pour raconter la Résurrection, Jean donne une série de récits dont le premier, celui qui implique Marie de Magdala, me semble-t-il, a été rédigé comme une chronique, sans intention théologique particulière et sans trop se soucier de convaincre qui que ce soit: une femme lance une rumeur et le témoignage d'une femme à cette époque dans cette culture n'a pas de valeur, pas plus qu'elle n'a à tripoter dans les affaires de théologie. Plus loin et plus tard, l'Evangéliste donne le chapitre XXI . Cette fois on entre tout au contraire dans un labyrinthe théologique qui cherche à apaiser un auditoire engagé, curieux et très exigeant... Jean balaye large; il est un auteur qui touche à quasi toutes les fibres de la passion spirituelle. Il nous donne à lire autant l'anecdote futile que le vertige métaphysique. Il ose dire la paranoïa d'un rabbi agressif et sa tendresse lorsqu'il laisse la tête d'un enfant s'abandonner sur sa poitrine. Il raconte l'embarras d'un Jésus délicat qui est forcé de réagir lorsque son entourage est outré par la dépense énorme et absurde d'une admiratrice passionnée. Il raconte des détails sordides de sa mise à mort... Tout est utilisé pour étoffer le savoir des chercheurs de Dieu. L'Evangéliste n'hésite même pas à traiter de cette récurrente incertitude inhérente à tout engagement spirituel digne de ce nom.

Mais à propos de cette incertitude justement, et de la possibilité de la voir dissoute soudainement dans une certitude pourtant très conjecturelle, il faut absolument revenir à la rencontre entre le Christ et Marie de Magdala au tombeau (chapitre XX ).

Marie est en larme devant un tombeau ouvert et vide. Elle croit être devant la trace d'une profanation, le dernier trait de cette barbarie, de cette méchanceté qui sévit depuis quelques jours autour d'elle... «Ils» méprisent donc jusqu'au cadavre de cet homme bon qui avait pu donner un sens à sa vie?... Elle n'a même pas le droit de faire son travail de deuil?

 

Lui, debout, derrière, lui dit...

-  Pourquoi pleures-tu? Qui cherches-tu?

Elle, au sol, brouillée de larmes...

-  Monsieur, si c'est vous qui l'avez emporté, dites-moi où vous l'avez mis, et j'irai moi-même le prendre.

-  Marie!

Cette voix!... Elle se retourne, crie...

-  Toi! Mon homme! Mon gourou! Toi! Vivant!...

Et elle se jette éperdue sur lui.

Il lui dit :

-  Arrête de me toucher...

 

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Ami lecteur, si tu as un cœur et quelque humanité à faire valoir, tu ne peux pas échapper à l'intensité surhumaine de cette vibration d'air qui ne prononçait pourtant que les syllabes d'un prénom... Cette simplicité brise l'envie de polémiquer. A cette altitude littéraire, le mot devient imparable, ne traiterait-il même que d'une affaire imaginaire...

Je suis de ceux qui pensent que toute personne digne de son humanité a gagné cette dignité non pas à l'heure de sa naissance, par une opération magique de la biologie, mais quelques années plus tard, lorsqu'elle a été en mesure d'entendre son prénom prononcé et dans lequel elle a pu se reconnaître intégralement prise en compte. C'était probablement ta maman qui te prononçait ainsi, ami lecteur, ou ton papa, ...ou alors c'était une personne que tu bouleversais. C'était peut-être même un inconnu, qui t'inquiétait d'ailleurs, parce qu'il te respectait jusqu'en ce que tu ne connaissais et ne connais toujours pas de toi-même... Ton prénom ainsi prononcé, tu l'as de moins en moins souvent entendu en devenant adulte. C'est parce que ton prénom se rattachait progressivement à une réalité de plus en plus ample, de plus en plus lourde, de plus en plus étoffée, ...de plus en plus inaccessible aux simples mortels.

Moi, à la suite de millions d'autres chrétiens, j'ai continué d'entendre mon prénom lorsque que ma maman ne pouvait déjà plus le dire intégralement. J'étais encore un enfant très petit. Mais j'avais déjà compris qu'aucune maman, qu'aucun papa et pas même un ami ne pourrait plus circonscrire aisément ma singularité croissante. (Oui, le petit de l'homme acquiert très très tôt, avant l'âge de raison, cette lucidité-là...) Dès cette époque, j'attribuais à celui qu'on m'avait appris à appeler Dieu l'origine de ce que j'entendais. Dieu a donc réussi sinon à me faire comprendre, au moins à me faire croire –et avec quelle ferveur j'y ai cru!– qu'il pouvait, lui, prononcer mon prénom pour me rassembler sous cette bannière dans sa propre sphère. Ma complexité ne sera pas condamnée à une solitude grandissante. Ma singularité ne sera plus nécessairement une arrête dans ma gorge, coincée «en moi», «pour moi» et «malgré moi». Il n'importait plus alors que ma maman, que mon papa et mes amis ne puissent plus me suivre jusqu'en cette angoissante efflorescence de ma nature puisque par cette nouvelle énonciation de mon prénom entendue dans les couloirs silencieux de ma complexité croissante, je savais que j'étais de toute façon déjà assumé ailleurs...

Je n'eus cesse depuis lors de chercher le regard de ce Dieu, de m'enquérir de ses goûts et de mendier son affection. Grâce à Lui, j'avais beaucoup à faire sur la terre avant de mourir. Grâce à Lui la déréliction me sera épargnée. La solitude ne me fera pas souffrir. Elle me manquera même: je ne serai jamais assez seul avec Lui pour mieux jouir de sa Présence. De fait, par la suite, j'ai cherché des partenaires, des amis, des admirateurs, des collaborateurs, des complices, ...mais jamais l'âme sœur! J'étais aimé, je l'avais entendu, je le savais, ...et cela me suffisait.

A l'inverse de Marie, je n'avais pas eu, moi, à me confronter au corps charnel de Jésus. A bien y regarder, c'est plutôt une chance.

«Heureux celui qui croit sans avoir vu.  »(Jn30,29)

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Je n'ai pas dû, moi, faire le deuil de ce corps qui fut probablement magnifique. Je n'ai pas dû batailler avec cette séduction-là dont on ne sort probablement jamais indemne et qui a pu entraîner certains à ramper jusque dans l'abnégation. (Ce Dieu qui prononce ainsi les prénoms n'aime certainement pas l'abnégation! A peine avait-Il dit «Myriam», que le Christ dû ajouter: «Noli me tangere» pour la protéger contre cette tendance plus instinctive qu'humaine.)

La Présence du Christ qui m'interpelait n'a pas l'impérieuse autorité d'un corps fait de chair et d'os... Jésus, ce Christ-là qui venait me prendre, me baiser, m'adorer, dès mon plus jeune âge, ne m'a jamais abusé et si moi, pour ma part, j'aspirais à toujours plus, Il n'a jamais dû me dire «Ne me touche pas!». Dieu merci, pour moi, dès l'âge tendre, sa Présence pouvait d'emblée se passer d'un référant trop incrusté dans les causalités de ma sphère. L'éloignement abyssal de son corps n'a jamais été cause de souffrance.

Est-ce pour cette raison que la vie sacramentelle m'est à ce point indifférente? Je n'ai pas faim de l'Eucharistie... Pardonne-moi, ami croyant et pratiquant, de vouloir confesser ce qui est peut-être un sacrilège à tes yeux: il me semble que le Sacrement est un pis-aller, une consolation, lorsque sa Présence sombre... (Je sais pourtant que d'autres lecteurs de Jean –et pas les moindres!– lisent au contraire dans le «noli me tangere» une invitation au repas Eucharistique...)

Le Christ, ce Christ-là qui a dit mon prénom, Il est présent sans être dans ma proximité, et c'est bien dans cette nuance-là que je peux déployer ma propre vie spirituelle. J'ai souffert parfois et je souffrirai peut-être encore de son absence, mais au moins ce ne sera pas la distance infinie qui me sépare de son corps Ressuscité qui en sera la cause.

 

*

Il lui dit :

- Ne me touche pas ; je ne suis pas encore monté vers mon Père. Mais va chez mes frères et dis leur que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu.

 

Cette humeur de Jésus qui écarte Myriam, et qui s'en justifie par la nécessité d'achever ce projet déjà bien avancé d'atteindre le paradis, j'en mesure donc la portée grâce à la prise en compte de ce qui distingue une «présence» d'une «existence proche». Avec nos conventions grammaticales, la «présence» est donnée comme une des caractéristiques possibles de l'existence de l'autre. Pour autant, la présence n'est pas une manière de dire sa proximité.

La présence est une caractéristique contingente de la relation entre l'un et l'autres au même titre que la proximité mais indépendamment d'elle. Que la proximité soit spatiale ou temporelle ne change rien à cela. Des années lumières me sépareraient de telle chose, que sa présence pourrait encore me caresser, me pénétrer... Inversement, la chose pourrait me toucher sans que je ne lui reconnaisse une présence forte.)

Cette dissection qui décolle la 'présence' de la 'proximité' semble d'abord futile et paradoxale. Disons-le alors par son envers pour mieux voir qu'elle n'est pas futile et que, s'il y a paradoxe, il doit absolument être assumé pour pouvoir décrire le monde dans lequel nous vivons.

Nous expérimentons tous un jour ou l'autre l'étreinte ou le baiser d'un corps vivant et pourtant absent... Il y a dans ce manque de présence, dans cette absence donc, quelque chose d'assez concret pour faire souffrir alors même que les corps se touchent. Cet exemple n'est peut-être pas le meilleur parce qu'il offre trop de prises aux mécréants, mais il donne la direction à suivre pour saisir la différence entre le Jésus historique et le Corps Ressuscité qu'il faudrait cesser de comprendre comme un phénomène magique, mythique, métaphorique ou impossible.

Laissez-moi évoquer maintenant la présence terrible que peut avoir une personne dans un rêve, alors qu'elle gambade éventuellement à l'autre bout du monde... D'aucun se moquera de cette comparaison en faisant valoir que ce n'est pas un autre mais la représentation d'un autre qui agit dans mon rêve... Dépouiller la représentation de toutes les réalités représentées me semble une entreprise illusoire mais soit... J'accepte momentanément l'objection pour me rabattre alors sur encore un autre exemple: la présence de la logique elle-même qui querelle mes raisonnements dans mon cerveau alors qu'elle est manifestement sans lieu. On me rétorquera alors que...

En fait, la querelle sera sans fin. La différence entre la proximité et la présence d'une chose est une expérience éprouvée, jamais prouvée. Oui, la présence est surtout et avant tout reçue. Il y a cent mille exemples à donner et tous laissent peut-être prise à quelques réserves logiques parce que la grammaire n'est que la grammaire mais un regard suffisamment généraliste (insuffisamment étriqué) laissera toujours une fissure ontologique entre la présence et la proximité. Cela me suffit pour expliquer une bonne part de la toute puissance du phénomène religieux sur l'humanité...

La présence n'est pas la proximité parce que la donation de la présence, contrairement à la "donation" de la proximité (qui est en fait "échange" et pas "donation"), n'est pas nécessairement réciproque: si A est proche de B, alors, B est proche de A, mais cela n'est pas toujours vrai pour la présence! La présence est une donation donc, mais elle peut être sans effet parce qu'elle nous laisse la possibilité de la refuser comme telle. La présence peut faire valoir encore d'autres "libertés" auxquelles la proximité ne peut prétendre. Ainsi dans le rêve ou, plus encore dans l'oeuvre d'art, une présence peut être extraordinairement "présente" au mépris de toutes les règles de la proximité, bien sûr, mais aussi de la logique, de la vraisemblance, de la matérialité, de l'unité même... Etc.

Autrefois, on pouvait se permettre de penser que ce qui est contradictoire n'est pas une chose, n'est rien, n'est pas... Cette vision du réel simplifiait nos analyses et encourageait la confusion entre présence et proximité. Mais cette manière de penser est devenue intenable à l'heure du soulèvement généralisé du peuple des pseudos, des avatars, les perceptions virtuelles, des flux de représentations transmis et trafiqués par des neurones et des câbles... Au XXIe siècle, le "cercle carré" existe, même s'il n'est toujours pas assumé par les topologies classiques: il possède ce minimum de détermination qui le distingue d'une galaxie, du cercle normal, d'un coquelicot ou d'une autre contradiction comme "le blanc qui n'est pas blanc" et "la ville qui n'est pas une ville"... Le "cercle carré" asservit autrement, moins intensément peut-être, mais réellement, ne serait-ce que des mouvements de molécules dans mon cerveau qui, en essayant de le soumettre aux règles grammaticales, transforme autrement ses réseaux de synapses... Les chaînes de solidarités entre le cohérent et l'incohérent, le réel et l'imaginaire, le concret et le virtuel (...) se révèlent de plus en plus au fur et à mesure qu'on affine notre pensée. Toutes les choses, sans exclusion aucune, s'engrènent les unes dans les autres... Pourvu que la "chose" soit, elle aura son mot à dire dans la course du monde...

Dieu fait partie de ces choses parce qu'Il l'a voulu, dit-on, mais chaque homme aussi, chaque idée ridicule, chaque pierre et tous les morts aussi... Tout existe. Tout agit. Et cette existence n'est évidemment pas qu'un effet de grammaire. L'être existe, si j'ose dire. Nous devrions pouvoir le ruminer jusqu'à découvrir l'évidence de ce que déclare Tristan Garcia dès la préface de son colossal travail d'ontologiste ("Forme et Objet", PUF2011): toute chose «est» dans la mesure ou elle «est dans» autre chose et, simultanément, dans la mesure où elle «comprend» encore d'autres choses. Ma propre existence ou celle de Dieu ou celle d'une pierre est toujours la résultante de ce qu'il reste lorsque je retire du contenant (de mon corps, de Dieu, de la pierre...) le contenu (de mon corps, de Dieu, de la pierre). Pour moi, c'est cela la sphère du Logos, et jusqu'à nouvel ordre, on n'y échappe pas, pas même Dieu qui s'y est donné (ou piégé?) pour métamorphoser sa solitude (c'est sa grandeur dans sa faiblesse)...

L'humanité a perdu son temps à affirmer et infirmer l'existence de Dieu en négligeant parfois d'admettre que la seule vraie question relève de sa Présence. La foi n'est pas l'affirmation que Dieu existe. Cette affirmation est idiote; pourquoi Dieu n'existerait-il pas alors que le cercle carré existe et impose ses caractéristiques à l'ordre de l'univers? Le cercle carré possède un être bien pauvre en déterminations, un être qui existe juste assez pour ne pas se confondre tout à fait avec l'être d'une autre contradiction dans un univers où le tiers exclu gouverne d'une main de fer... Mais peut-on en dire autant de Dieu qui est toujours riche assez pour être utilisé comme motif de mille conflits aujourd'hui encore, pour son propre désarroi et le nôtre? Toutes ces contradictions qui nous entourent nargueraient Dieu de leur peu d'être parce que Dieu lui en serait tout à fait dépourvu? Allons! Allons! Dès qu'on parle, Dieu aussi prend une forme, comme toutes les choses... et, pour celui qui est assez humble pour l'entendre, cela ne l'amoindrit en rien!

La Présence du Christ, voilà ce qui m'importe ici... Sa Présence; je veux dire cet évènement-là qui martèle ma propre solitude originelle d'une manière qui n'est que de Lui... C'est dans ce cadre-là qu'il faut repenser la Résurrection et l'humeur de Jésus qui dit «noli me tangere». Ce n'est pas que le Ressuscité soit intouchable; admettons simplement que le toucher, ce serait toucher une relique. (Et s'il faut qu'il y ait quelques traits du miracle dans cette relique-là, alors allons-y pour les miracles; ce ne sera ni le premier ni le dernier que les scientifiques auront à éprouver s'ils estiment que l'enjeu vaut la chandelle!) Mais il me restait à dire aussi que lorsque je touche le corps de mon frère, je touche aussi une relique! Pour le toucher lui, il me serait peut-être plus utile de me focaliser sur sa Présence. Il y a déjà du ressuscité en chacun de nous et ce que le Christ Ressuscité nous suggère, c'est de privilégier ce niveau-là de la relation. Chaque neutron, chaque électron, chaque boson de notre corps nous quittera pour laisser d'autres venir, ou pour ne laisser rien venir... Le boson, l'électron, le neutron ira peut-être tout à l'heure s'installer dans le corps d'un autre, tout comme un boson, un électron, un proton qui a constitué le corps charnel du Christ est peut-être actuellement, et pour quelques secondes, dans l'échafaudage de ce que je suis... Que m'importent les reliques et les particules élémentaires et les échafaudages... Ce n'est pas d'interactions mais de relations dont j'ai soif. Les reliques assistent, éclairent, mais elle ne devraient pas être la matière de ces relations qui rendent l'amour possible.

Toutes les reliques risquent de me faire négliger les déterminants les plus importants de ces "choses" que l'on appelle "Arbre", "Animal", "Homme" et "Dieu". Le chrétien pense que Dieu a pris chair à un moment précis dans l'Histoire et que, puisqu'il a été ainsi, il est encore dans l'Histoire, il est un souffle du passé qui existe pour l'éternité comme toutes les choses passées, comme le souffle qui gonfle les voiles d'un trois-mâts. Le jeu proposé par la spiritualité chrétienne se joue avec la Présence de tous ces noeuds de déterminants dont le passé matériel ne fut qu'un échafaudage passager. Ce qui fut la chair de Jésus, le carbone, l'azote, les milliards d'électrons qui ont participé à la cohérence positive de son corps, constituent aujourd'hui la matérialité d'autres choses, éclairent peut-être parfois d'autres présences... Qu'importe. En embrassant, en serrant Jésus, Myriam ne serrait pas tant Jésus que la lampe qui l'éclairait ce jour-là...

Il ne faut plus avoir peur de mourir médicalement parce que tout se joue dans ces abyssaux labyrinthes métaphysiques dont la mort pure et dure n'est qu'un illusoire reflet, une puérile simplification voire une outrageante démystification de l'univers par la pensée mesquine.

Nous, chrétiens, nous voulons qu'entre cette Présences et ce qu'il y a de plus intime en nous, se construise une relation que nous appelons «Agapè».

 

 

paul yves wery - Chiangmai - Aout 2012

Version 1.02 - Juillet 2014

 

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