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Sur l'adultère, les mauvais désirs, le divorce...

Abstract: Texte représentatif de la pensée catholique du début du XXe siècle; Durand ("Evangile selon St. Matthieu", p.86 dans la 16ème édition(!) chez "Beau Chêsne Croît" en 1929).

Le mariage : adultère et mauvais désir, divorce, Mt5,27-32

« 27 Vous avez entendu qu'il a été dit aux anciens : « Tu ne commettras point d'adultère. » 28 Et moi, je vous dis que quiconque regarde une femme avec convoitise a déjà commis l'adultère avec elle dans son cour. 29 Si ton oeil droit te scandalise, arrache-le et jette-le loin de toi ; car il vaut mieux pour toi qu'un de tes membres périsse, et que ton corps entier ne soit pas jeté dans la géhenne. 30 Si ta main droite te scandalise, coupe-la, et jette-la loin de toi ; car il vaut mieux pour toi qu'un de tes membres périsse, et que ton corps entier n'aille pas dans la géhenne.

31 Il a été dit : « Que celui qui répudie sa femme lui donne un acte de divorce. » 32 Et moi, je vous dis que quiconque répudie sa femme, sauf pour cause d'infidélité, la rend adultère ; et que celui qui épouse une femme répudiée commet un adultère. »

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Le sixième commandement, qui défend l'adultère, est cité ici d'après l'Exode Exode, xx, 14. . La loi nouvelle, celle de l'Évangile, défend jusqu'aux mauvais désirs. Il est vrai que Moïse avait déjà interdit de « convoiter la femme de son prochain Exode, xx, 27 » ; mais il avait entendu prohiber et punir l'injustice inhérente à la convoitise du bien d'autrui, plutôt que le désordre même du désir impur. C'est pourquoi, il énumérait dans une même phase l'épouse, la maison et le champ du prochain. En outre, la loi mosaïque qui défend l'adultère proprement dit, se taisait sur la simple fornication; tandis que Jésus-Christ dit à dessein en termes généraux: Quiconque regarde une femme, mariée ou non, et conçoit tour elle un désir mauvais et volontaire, est déjà adultère en son cour.» Supprimer le désir, c'est tarir la source des actes coupables . (MT., XII, 34; XV, 19) .

Ce qui précède concerne le mauvais désir volontaire; dans les deux versets qui suivent (29-30) il est question du désir involontaire, ou plutôt de sa cause. Il s'agit de l'occasion prochaine du péché à retrancher coûte que coûte. L' «oeil droit» à arracher, la «main droite» à cou­per, sont des métaphores pour signifier ce qui nous tient de plus près, ce que nous avons de plus cher, et, tout au moins en apparence, de plus utile. Si la fortune, la santé, les amis, les parents mêmes deviennent pour nous un «scandale» (Mt, XVIII,8-9) , une occasion de chute, et que l'éloigne­ment soit le seul moyen efficace de nous préserver; il n'y a pas à hésiter, car, le royaume de Dieu ou la géhenne! C'est l'obligation où nous sommes de subor­donner les intérêts temporels à la vie éternelle. L'Évan­gile y revient souvent. (Mt, VIII,22 ; X,37).

Au sixième commandement, Notre-Seigneur rattache l'indissolubilité du mariage (31-32). Moïse Deut, XXIV,1 avait permis le divorce, ou du moins ne le punissait pas, mais il s'était préoccupé de restreindre le mal par tout un en­semble de prescriptions, que par la suite les docteurs de la Loi devaient interpréter différemment. Au temps de Jésus-Christ, les uns n'admettaient le divorce que dans le cas d'adultère de la femme, tandis que d'autres l'au­torisaient aussi souvent qu'il plaisait au mari d'y recou­rir. Seulement, celui-ci devait remettre à l'épouse ren­voyée une attestation écrite, dite «acte de répudiation».

Le chapitre XIX,3-12, de saint Matthieu fait connaître dans quelles circonstances, Notre-Seigneur fut amené à rendre au mariage son indissolubilité primitive. Dans ces deux passages, on lit une clause restrictive, qui a de tout temps fait difficulté. Comment entendre «sauf le cas d'infidélité?» D'autres traduisent ici par fornica­tion, ou encore impudicité, le mot qui se lit dans le texte original manquant de précision. Généralement, les interprètes catholiques estiment que cette restriction permet seulement la séparation de corps et de biens, en cas d'adultère, sans divorce proprement dit. Jésus-Christ n'a mentionné que l'adultère, parce que c'est la seule cause permanente de séparation; la seule aussi qui soit exclusivement propre à la rupture de la société matri­moniale.

A cause des variantes que présente le texte grec, surtout au chapitre XIX,9, des critiques, même parmi les catholiques, se sont demandé, mais sans raison suffisante, si cette parenthèse est authentique. D'autres, en petit nombre, ont proposé de voir ici une disposition temporaire, ne concernant que les chrétiens d'origine juive: Jésus-Christ les aurait autorisés à divorcer, en cas d'adultère, tant que la Loi mosaïque ne serait pas complètement abrogée. Supposition assez arbitraire, et restée sans écho. Plus inadmissible encore est l'opinion de ceux qui rendent l'évangéliste responsable d'une addition.

Avec saint Augustin, il faut convenir que le texte de saint Matthieu reste obscur, et que d'autre part, dans saint Marc, saint Luc et saint Paul (MC. X, 11-12; Lc, XVI, I Cor, VII, 10-11; Cfr. Rom, VII,1-3.), Jésus-Christ condamne manifestement le divorce proprement dit, puisqu'il interdit aux époux séparés, même pour un motif légitime, de se remarier du vivant de leur conjoint. Tant que la société chrétienne fut comme un jardin fermé au milieu du monde païen, il ne paraît pas qu'on y ait mis en question l'indissolubilité du mariage; mais, avec la conversion en masse au christianisme, qui eut lieu du IVe au VIIe siècle, des divergences se produisirent à ce sujet. Volontiers, les chrétiens divorcés, appartenant d'ordinaire aux classes dirigeantes, se réclamaient de l'exception qui se lit dans saint Matthieu: «Sauf le cas d'infidélité.»

C'est de la pratique abusive que sont nées les controverses. L'habitude invétérée du divorce, aussi bien dans l'Empire que chez les Barbares, s'abritait sous les dispositions du code civil, qui restaient comme une protestation du vieux monde contre la loi évangélique. Des divergences doctrinales se produisirent alors, et allèrent en s'accentuant à mesure que les Orientaux d'abord, puis les Protestants, s'écartaient de l'unité chrétienne. Mais toujours l'Église catholique a condamné le divorce comme contraire à la loi divine, ramenée par Jésus-Christ à son intégrité première.

Traduction et commentaire de A.Durand ("Evangile selon St. Matthieu", p.86 dans la 16ème édition(!) chez "Beau Chêsne Croît" en 1929)...