Chapitre 3,16-30 : L’avis des frères ? (2)      17.01.84

      La Règle, maîtresse de vie !

 

Mes frères,     

 

            Nous venons d'entendre une des sentences les plus belles qui soit sortie du coeur et certainement de la bouche de Saint Benoît avant d'avoir glissé à l'extrémité de sa plume. Et c'est celle-ci : omnes magistram sequantur regulam 3.16. Que tous suivent la Règle comme une maîtresse de vie.

 

            Essayons de mesurer l’humilité et l'effacement de Saint Benoît devant une réalité qui le dépasse. Il est le rédacteur de la Règle. Cette Règle est son œuvre. Et pourtant il sait qu'elle vient de plus haut que lui, d'au-delà de lui. Car tous doivent prendre la Règle comme maîtresse de vie. même lui , Je me demande si vous saisissez ?

            Saint Benoît ne rédige pas une Règle au-dessus de laquelle lui se situerait.  Non ! Il se place en dessous de la Règle qu'il a rédigée. Pourquoi ? Mais parce que cette Règle, il le sent. il le sait, elle ne vient pas de lui, elle vient d'ailleurs. Saint Benoît a été l’instrument providentiel dont la vie, l'expérience et le talent ont permis de couler dans un écrit une Tradition faite de la recherche, des luttes, de l'ascèse, de la foi d'une multitude de saints.

 

            La Règle n'est donc pas le résultat d'un travail en chambre. Non ! Saint Benoît est certainement arrivé à la fin de sa vie - ce ne sont pas ses derniers jours, ni peut-être même ses dernières années, mais c'est une fin - à un moment où, pour prendre une expression d'aujourd'hui, il a dépassé la vitesse du son.

            Il est au-delà de lui-même. Il est chez Dieu et il peut à ce moment-là saisir tout ce que lui ont apporté ses prédécesseurs dans la vie monastique, ajoutant alors à ces trésors son expérience personnelle qui a fructifié sur eux. Il est en état de livrer son enseignement à ses disciples et même de le fixer par écrit, car lui disparu, cela pourrait se perdre. Et ce n'est jamais lui, me semble-t-il, qui a eu l'idée de rédiger une Règle ; mais certainement que ça lui a été demandé ?

 

            D'ailleurs, à cette Tradition dont il s'est nourrit et dont il est un des fruits les meilleurs, il se réfère à la fin de sa Règle explicitement. Il dira: Voilà, j’ai rédigé ceci pour les débutants que nous sommes tous. Mais si vous voulez aller au sommet, même au-delà du sommet, il y a tous ceux qui sont venus avant nous. Allez voir là-bas ! 73, 1-9.

 

            Mes frères, pour oser dire que tous dans le monastère et en toute chose vont prendre comme Maîtresse de vie cette Règle, la Règle. pour oser dire cela, il faut être arrivé loin au-delà de l'échelle de l'humilité. Car par la Règle, nous remontons aux origines, à la Parole de Dieu certes, et à l'ébranlement produit par cette Parole chez les hommes, des hommes qui sont saisis par ce que l'Esprit Saint leur fait comprendre, des hommes qui à ce moment-là ne savent plus se tenir : ils sont dans un état d'agitation permanente.

            Mais attention ! Ce n'est pas une agitation furieuse ni une agitation morbide. Ils sont inquiets, ils ne savent plus goûter de repos jusqu'au moment où la Parole aura pris corps en eux et où se sera réalisé pour eux ce que la Parole a semé dans leur cœur.

            C'est ce que disait aussi Saint  Augustin : notre cœur est sans repos jusqu’à ce qu’il t’ait trouvé ! Là est le lieu de notre repos : au sein de la Trinité. Nous sommes venu du coeur de Dieu et c'est là que nous devons retourner. Voilà donc où la Règle nous reconduit, jusqu'à ces origines-là !

 

            Et comme souvent avec Dieu, tout commence dans l'obscurité et avec rien. Nous l'avons entendu aujourd'hui. Antoine entre dans une église. Il rentre dans son église. Antoine est un jeune homme d'une vingtaine d'année, comme les autres dans son petit village. Il entre dans l'église et il entend une Parole. Et cette Parole pénètre en lui. Et c'est le début de l'aventure monastique.

            C'est moins que rien ! Et je dois reconnaître que Dieu n'agit pas encore autrement aujourd'hui. Cela ne veut pas dire que nous allons entrer dans une église et puis entendre une Parole. Non, le même scénario ne se reproduit pas deux fois. Mais pour chacun d'entre nous, si nous voulons remonter - si nous le savons, parce que ça nous a peut-être échappé - si nous savons remonter à l'origine de notre appel : il y a une petite chose de rien du tout. Et à partir de là, ça grandit en nous. Et nous ne savons pas où ça va s'arrêter.

 

            Antoine ne soupçonnait absolument pas ce qui allait suivre. Il ne savait pas du tout à l’âge de vingt ans qu'il deviendrait le Père des moines pour l'éternité. Il ne savait pas tout ce qui se mettait en route avec lui. Nous ne savons pas ce qui se met en route avec nous non plus ! Cela ne veut pas dire que nous allons devenir le patriarche d'une nouvelle génération de moine, loin de là !

            Mais dans l'invisible, dans le monde de l'éternité, nous ne sommes pas seuls. Et si comme Antoine nous sommes fidèles, nous aurons le sort d'Antoine. Lorsque nous paraîtrons, lorsque nous serons en plénitude dans l'univers de Dieu, nous dirons : mais qui m'a donc engendré tout cela ? J'étais seul comme un bois sec. Mais d'où me sont-ils venus tous ceux-là ?

 

            Et je l'ai remarqué ce matin en écoutant à l'Office de nuit. Nous trouvons dans le début de la vie de Saint Antoine déjà les composantes essentielles de la vie monastique. On nous a dit trois choses. C'est par ça que Saint Athanase commence. Il nous dit qu'Antoine travaillait de ses mains pour assurer sa subsistance. Et ce qu'il avait en excédent, il le donnait, il le distribuait aux indigents. Déjà donc le travail ! La première des choses. c'est le travail !

 

            N'allons pas encore une fois essayer de trouver plus de valeur intrinsèque au plan monastique à une chose qu'à l'autre. Non, mais dans la pratique concrète, il faut d'abord vivre, il faut d'abord respirer, il faut manger. Donc la première chose qui se présente avant tout, c'est le travail. Puis il disait en second lieu, immédiatement après que Antoine priait sans cesse.

            Cela veut dire que Antoine prenait sa journée, il la dirigeait vers Dieu et Dieu soutenait toute l'activité d'Antoine. Nous avons là à l'état embryonnaire notre Office divin, sa raison d'être qui est de prendre, de nous prendre tels que nous sommes dans nos activités de toutes sortes - spirituelles, intellectuelles, physiques, corporelles, biologiques, tout - nous prendre et nous diriger vers Dieu.

            Maintenant, oui, on reprend ça sept fois par jour et la nuit et il nous dit que Saint Antoine priait sans cesse. Cela ne nous empêche pas non plus de prier sans cesse. Entre disons les heures de l'Office que nous avons, il faut que tout notre être soit sans cesse dirigé vers Dieu. C'est cela la prière continuelle.

 

            Et enfin Saint Athanase nous dit qu’Antoine était assidu à la Lecture. A tel point que tout ce qu'il lisait, toutes ces lectures s'imprimaient en lui. Si bien que plus tard, lorsqu'il se trouverait dans le désert, il n'aurait plus besoin du secours des livres. Il connaissait par cœur toute l'Ecriture. Elle s'était imprimée en lui.

            Nous avons là la Lectio Divina, se nourrir de la Parole de Dieu pour qu'elle s'imprime en nous, ou, que nous faisions corps avec elle et qu'elle devienne le moteur réel de notre vie.

 

            Voilà, mes frères, tout cela nous permet de comprendre que si la vie d'Antoine a été normative pour toujours et pour tous, Saint Benoît, lui, qui est au courant de tout cela, va donc dire que sa Règle qui est la quintessence de l'expérience, non seulement d'Antoine, mais d'autres disciples d'Antoine, elle est vraiment la Magistra, la Maîtresse, celle à laquelle il faut se référer pour trouver la vie et pour mener une vie convenable, la vie que Dieu attend de nous.

 

            Voilà, mes frères, pour ce soir ! Et ainsi nous avançons de fête en fête, de mémoire en mémoire, nous avançons vers le Royaume de Dieu.

 

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       17.05.85

      Prendre l’avis des frères ?

 

Mes frères,

 

            Les manières de consulter la communauté ont subi beaucoup d'avatars au cours de l'histoire, et mon intention ne sera jamais, me semble-t-il, de les suivre et de les détailler. Nos Constitutions prévoient aujourd'hui les matières importantes au sujet desquelles l'Abbé est tenu de prendre l'avis des frères. Nous les passerons en revue lorsque nous serons arrivés à cet endroit dans l'étude de nos Constitutions.

            Mon intention pour aujourd'hui est de dégager devant vous l'image que Saint Benoît se fait de la communauté monastique idéale, une image si belle. Et il désirerait, j'en suis certain, aujourd'hui, du lieu où il est, c'est à dire chez Dieu, imprimer cette forme sur notre propre communauté.

 

            Dans le chapitre précédent, il nous a longuement parlés des qualités de l'Abbé. Il dit, entre autre, que l'Abbé tient dans le monastère la place du Christ. Et pour cette raison, l'Abbé ne peut jamais gouverner à la façon d'un despote éclairé.

            Vous savez ce que c'est qu'un despote éclairé ? C'est un homme qui possède de l'autorité sur un royaume, sur une région, sur une communauté, et qui prend des décisions seul, de façon arbitraire, en se fiant à ses propres lumières. Mais toujours dans son esprit pour le bien de tous, et le sien aussi naturellement.

            L'Abbé ne peut jamais être un autocrate. Il est essentiellement l'intendant de la maison de Dieu. Il sera donc parmi ses frères toujours le premier à ne pas avoir de volonté propre. Il sera l'exécutant le plus fidèle des vouloirs divins.

 

            Il sera donc à la fois de ses frères, et le plus pauvre, et le plus riche. Le plus pauvre parce qu'il ne possède absolument plus rien. Et le plus riche, parce que les trésors de la volonté divine reposent dans son cœur. Il ne possède plus rien. C'est à dire qu'il ne se possède plus.

            L'Abbé est un homme vendu, il est un homme livré. Il est un serviteur. Et la Christ vit réellement en lui la forma Christi. Donc la forme du Christ qui est la forme de serviteur, elle est imprimée dans tout l'être de l'Abbé.

 

            Si bien qu'il est devenu la chose, la possession de ses frères qui peuvent tout lui demander. Cela ne veut pas dire qu'il va se laisser exploiter. Non, ils peuvent tout lui demander ce qui est dans la ligne de leur salut, donc de leur accomplissement spirituel.

            L'Abbé, de son côté, veillera à ce que la volonté des frères soit toujours comme la sienne dans l'axe de la volonté divine. C'est en cela que consiste son service. C'est un service de tradition, la tradition d'une vie, de la vie de Dieu qui doit battre dans le cœur de chacun et transfigurer le corps et l'esprit de chacun des frères.

 

            Vous voyez que à la fois il est le plus pauvre parce que il ne s'appartient plus, qu'il appartient à Dieu, au Christ, aux frères ; et il est le plus riche parce que il est le dépositaire de ce projet de Dieu. Et c'est par lui que ce projet de Dieu va réussir, ou peut-être échouer si lui n'est pas fidèle, s'il détourne à son profit les trésors que Dieu lui confie. A ce moment-là, c'est très grave parce qu'il est un fraudeur. Il n'est plus vrai, c'est de la fausse monnaie.

 

            Et voilà, mes frères, ce que Saint Benoît attend de l'Abbé. Et vous voyez se dessiner derrière lui, derrière sa relation avec les frères, toute une communauté, une communauté qui devient un organisme en croissance, un organisme qui ne meurt pas. Je vous l'ai déjà dit, même si une communauté à la suite de toutes sortes de circonstances est effacée ici sur terre, mais cette communauté vit dans le monde à venir. Elle est là plus vivante que jamais, réellement vivante.

            Donc, mes frères, une communauté a devant elle les promesses de la vie éternelle. Ne l'oublions jamais, nous faisons partie - ne regardons pas notre communauté, ici, telle qu'elle est. Ayons le regard plus large !

 

            Monseigneur Hamer a dit ceci au cours de son homélie. Je l'ai retenu. Et à ce moment-là, je pense qu'il improvisait car depuis une minute il ne regardait plus le petit aide mémoire qu'il avait devant lui. Il a dit ceci : Il faudrait que nous soyons semblables à Newman, qu'on puisse dire de nous ce qu'on disait de lui. C'est à dire que Newman vivait dans la société des anges et des saints beaucoup plus qu'avec ceux parmi lesquels il se trouvait. C'est cela le moine contemplatif. Newman n'était pas un moine. C'était un Cardinal.

             Mais voyez où nous devons aller chercher nos exemples. Il était quand même un contemplatif. Et Newman vivait dans cet univers de Dieu, là où tout est accompli. Et là était sa foi, là il avait son espérance, et la force de son enseignement, et la sécurité qu'il donnait parce que son regard voyait au-delà des apparences. Il était déjà dans l'éternité.

 

            Mes frères, nous devons être ainsi. Et Saint Benoît de façon très simple, très gentille, très subtile aussi, nous l'insinue encore aujourd'hui. Car l'Abbé prend le conseil des frères, c'est certain. Mais à mon avis, je pense qu'il faut élargir cette communauté au-delà des cadres actuels.

            Donc l'Abbé, dans les choses difficiles, complexes, qui ne sont pas clairement définies par la Règle, - les choses ordinaires sont bien définies par la Règle. Il suffit de la suivre, ce n'est pas difficile. - mais parfois, voilà, on ne sait pas trop bien que faire. Donc il faut consulter. Il faut consulter qui ? Il faut consulter Dieu à travers la communauté.

 

            Mais attention, ce n'est pas seulement la communauté, je le répète, qui est présente ici, mais c'est aussi la grande communauté, celle qui est déjà entrée dans le Royaume. Et à partir d'elle, de ses intentions, voir la ligne du dessein de Dieu pour aujourd'hui. Ce n'est pas une ligne qui commence aujourd'hui, mais elle vient de plus loin. Il faut pouvoir la suivre et voir si la ligne d'aujourd'hui est bien dans la continuité de cette Tradition. Et ça, c'est aussi une façon de consulter. Mais l'Abbé seul peut faire cela.

 

            Maintenant, il consulte aussi naturellement les frères qu'il a devant lui. Pourquoi ? Parce que l'Esprit prophétique, depuis la Pentecôte, ne repose plus sur un seul homme. Il repose maintenant sur le peuple entier. Le peuple entier est devenu un peuple de prophètes. Si bien que le vœu exprimé par Moïse s'est réalisé : Ah, si au moins tous pouvaient être prophètes !

            Eh bien, c'est arrivé maintenant. C'est une aubaine. Il faut donc profiter de cette grâce. Mais encore est-il nécessaire que cet Esprit de prophète puisse travailler librement dans le cœur des frères. Il ne faut pas que ce cœur soit fermé, que ce cœur soit froid, que ce cœur soit paralysé.

            Donc, comme le dit Saint Benoît ici, il faut que le frère donne conseil en toute humilité. Il ne doit jamais défendre son propre point de vue de façon grossière, procaciter, 3, l0, effrontée. Non, l'Esprit parle à travers l'humilité, pas à travers l'effronterie.

 

            Eh bien, mes frères, dans ces conditions, le Seigneur révèle ce qui est le meilleur. On traduit ici en français : Dieu révèle. En réalité, dans le texte de Saint Benoît, c'est Dominus, c'est le Seigneur ! C'est à dire le Seigneur Jésus dont l'Abbé est le lieutenant. Il révèle à l'Abbé directement par l'intermédiaire des frères, par l'intermédiaire d'un frère parfois, il lui révèle ce qui est le meilleur, il lui révèle son vouloir. Si bien que vous voyez la connexion admirable : Christ-Abbé-Frères qui forment un seul corps pensant et agissant.

 

            Mes frères, soyons conscient de cette solidarité, de cette communion : communion avec le Christ, communion entre nous, l'Abbé étant la conscience éveillée de la communauté. Et nous, en relation alors avec la grande communauté monastique, celle qui est déjà à partir d'ici entrée dans le Royaume de Dieu ; et au-delà alors, l'Eglise entière et plus largement encore toute l'humanité qui est en train de se construire et d'être divinisée en un immense Royaume de Dieu.

 

            Voilà mes frères, c'est bien en relation avec le Temps Pascal, avec cette Ascension du Christ qui porte l'humanité jusqu'au sein de la Trinité, et puis qui va dans quelques jours - dans quelques jours, c'est le jour éternel de Dieu - nous envoyer son Esprit pour que à notre tour nous puissions aller là où il nous a précédés.

 

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       16.09.86

      Suivre la Règle notre maître !

 

Mes frères,

 

            Pour parler dignement et correctement de notre Règle et surtout de ce que nous venons d'entendre ce soir, il faudrait avoir la vigueur spirituelle et le talent de notre Père Saint Bernard qui, dans la magnifique langue latine, jonglait avec les mots, avec les tournures. Sous les mots, il découvrait des mystères. Il les tirait au jour. Il s'en nourrissait. Il les donnait généreusement pour l'alimentation de ses frères.

 

             La première phrase que nous avons entendue est construite sur le mode du parallélisme antithétique, donc d'une manière très biblique. Il y a là quelque chose qui nous est déjà insinué. Il y a là une approche, un affleurement plutôt, l'affleurement d'une parole qui a son origine dans le coeur même de Dieu, dans le cœur même du Christ. Nous allons le découvrir, mais je vais vous le dire maladroitement, grossièrement parce que je ne suis pas Saint Bernard.

 

            Saint Benoît nous dit ceci. D'abord une affirmation de nature positive : Tous suivront la Règle. Puis une affirmation de nature négative: Personne n'aura la témérité de s'en écarter. Au centre se situe la Règle maîtresse de science, de sagesse, de vie. La Règle qui est un condensé de l'Evangile, c'est à dire de ce que Dieu veut bien nous révéler de son être.

            Et voici, mes frères, la beauté et le sens du mystère qu'avait notre Père Saint Benoît. Il utilise pour désigner cette Règle le mot, le qualificatif que le Christ s'applique à lui-même, c'est à dire Maître. Vous ne donnerez à personne sur terre le titre de Maître, dit-il. vous n'avez qu'un seul Maître, moi, le Christ.

 

            Or, voici que Saint Benoît utilise ce mot Maître à propos de la Règle. Voyez son audace ! Voyez son esprit de foi ! Voyez tout ce qu'il y a derrière, à quoi nous nous engageons lorsque nous promettons obéissance selon la Règle de Saint Benoît ! A ce moment-là, nous nous engageons à suivre le Christ en tant qu'il est notre Maître, c'est à dire celui qui possède les paroles de la vie éternelle, lui seul et personne d'autre. Alors on comprend mieux que Saint Benoît dise : Tous suivront la Règle et personne ne s'en écartera à la légère. 3,17.

 

            D'un  côté, tous suivent la  Règle; de l'autre côté, personne ne s'en écartera. Parce que suivre la Règle, c'est suivre le Christ et s'écarter de la Règle, c'est abandonner le Christ et donc glisser à sa perte. Et Saint Benoît introduit cette sentence sur un mode emphatique. In omnibus, 3,16, dit-il, c'est le premier mot, donc en toute chose, donc en toute circonstance, en tout lieu, en tout temps on suivra la Règle. On ne s'en écartera jamais. La vie toute entière est saisie. Il n'y a pas de compartiment qu'on se réserverait. Non, c'est tout, in omnibus !           

 

            Lorsque nous promettons obéissance selon la Règle de Saint Benoît, nous ne savons pas ce que nous faisons. Et il est bon d'y réfléchir de temps en temps, de se le rappeler. Les circonstances, les moments, les lieux n'ont pas d'importance pour Saint Benoît. Tout est englobé.

            Dans le concret, maintenant, de notre existence quotidienne, que se passe-t-il ? Eh bien, nous agissons temere, dit Saint Benoît, 3,17, témérairement, inconsidérément, sans réfléchir, à la légère. Cette légèreté est le propre des étourdis qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, ou bien des gens qui sont tellement imbus de leur importance qu'ils croient tout pouvoir se permettre, même de s'écarter de la Règle.

 

            Eh bien, dans la pratique quotidienne, nous agissons souvent comme ça à la légère et nous devons nous en garder. Je veux bien obéir, mais jusque là. Il va se présenter quelque chose d'imprévu, d'un peu heurtant, mais je ne suis pas d'accord. Je veux bien obéir aussi longtemps que ça entre dans mes cordes, que ça entre dans ce que je suis, que ça me convient, que ça me met en valeur, que ça me permet de développer mes qualités naturelles.

            Mais si je dois mourir par une partie de moi, si je dois être blessé, à ce moment-là je recule et je dis : « Non, je ne suis pas venu pour cela ! » A ce moment-là, inconsidérément je m'écarte de la Règle.

 

            Voilà, mes frères, prenons tout de même bien garde parce qu'il ne s’agirait pas que pour des bêtises et pour des points d'honneur nous perdions notre temps. Le moine est donc - on ne le dira jamais assez - un homme qui veille sur soi, qui veille sur ses pensées, qui veille sur sa conduite.

            Il peut être pris de court, il peut être surpris, il peut avoir un moment de recul, un réflexe de fuite. Il peut avoir des paroles d’égarement en pensées, dans son cœur, aussi de bouche. Mais il ne doit pas aller trop loin. Il doit, un moment donné, reprendre ses esprits et reporter les yeux de son coeur sur cette volonté de Dieu qui lui est demandée et qui est partout présente dans le monastère.

            Voilà, mes frères, pour ce soir. Vous voyez tous les trésors qui se trouvent dans notre Règle. Et le métier du moine, ce n'est pas quelque chose de facile, ce n'est pas une sinécure. Ce n'est pas pour des gens qui ont peur de la vie et qui viennent se planquer dans une sorte de préretraite, de prépension. Non, ce n'est pas possible.

 

            On me parlait après-midi à la brasserie d'un monsieur que nos brasseurs ont rencontré hier. Il est âgé de 32,33 ans. C'est encore la pleine force. Et il disait : je voudrais bien avoir déjà 60 ans parce qu'il se passe tellement de choses aujourd'hui dans la vie que je ne sais plus que devenir !

            Voyez, mes frères, il ne faudrait pas que nous ayons cette mentalité-là. Naturellement, cet homme est sans doute affronté à beaucoup de difficultés. Pour gagner sa vie aujourd'hui pour un industriel, il vaut vraiment lutter, et parfois on est écrasé.

 

            Mais nous qui avons entrepris cette lutte contre les vices de la chair et de l'esprit, nous ne devons pas lorsque les difficultés se présentent - et elles sont là tous les jours - nous ne pouvons pas dire : « Ah, si je pouvais déjà avoir et être au-delà de tout cela ! »

            Non, ayons le courage d'affronter la situation jour après jour, heure après heure afin de grandir dans la foi, dans l'amour, dans cette espérance qui nous fait déjà posséder ce qui nous est promis.

 

Chapitre 3, 16-fin : L’avis des frères ? (2)     16.09.86

      Les conseils de l’Abbé !

 

Mes frères,

 

            Ce que Saint Benoît nous disait hier est sous-jacent à ce qu'il nous dit aujourd'hui, à savoir que dans ses relations avec Dieu et avec ses frères, l'Abbé doit toujours avoir conscience que la force qui l'habite ne vient pas de lui, mais que par contre la faiblesse qu'il découvre en lui est bien de lui. C'est pourquoi il agira toujours avec prudence. Il s'entourera de conseils afin d'avancer avec sûreté sur la route de Dieu en se gardant bien de courir sur des sentiers à lui. Cela vaut pour l'Abbé, cela vaut pour les frères.

 

            Le plus grand risque, le plus grave risque que puisse courir un monastère, c'est de s'engager sur une route qui ne conduit pas au Royaume de Dieu. Ce serait d'avoir, comme on dit aujourd'hui un projet communautaire qui peut être exaltant pour chacun mais qui aurait un objectif non avoué qui germerait sur le moi préfabriqué collectif communautaire ; cet objectif étant l'épanouissement total de chacun laissant de côté alors le mystère de la croix, le dépouillement dans lequel on doit entrer, la mort mystique que l'on doit connaître. C'est ce qui fait entre autre le succès de beaucoup de petites communautés que l'on voit surgir un peu partout aujourd'hui.

 

            Je lisais justement tantôt dans un sermon de Saint Bernard sur le Cantique des Cantiques, le sermon 64 où il décrivait les petits renards qui ravagent les vignes, donc les tentations les plus courantes chez les moines pieux. Et entre autre, c'est celle-là : le tentateur ne présente jamais une chose dans ses apparences mauvaises. Non, c'est toujours des apparences de bon, de beau, et on est séduit.

            On est entraîné sans qu'on prenne bien conscience qu'à ce moment-là on quitte la route qui conduit à Dieu et qu'on s'engage sur une voie très large, disons une sorte d'autoroute sur laquelle on a l'impression d'avancer et de faire du bien. Et en réalité, cette autoroute n'aboutit à rien. On tombe dans un néant. Et alors, c'est la ruine pour la personne.

 

            C'est que la vie monastique, elle est d'ordre surnaturel dans son but et dans ses moyens. Dans son but, qui est de transformer des êtres charnels en fils de Dieu. Et dans ses moyens qui sont les vertus théologales : la foi, l'espérance, la charité, puis les sacrements. Mais cette vie monastique d'ordre surnaturel est incarnée dans des structures, dans des supports matériels, et elle est vécue par des hommes soumis aux déterminismes les plus humbles et les plus contraignants de la nature humaine.

 

            Voyez comme il faut pouvoir vivre sainement et correctement sont statut d'incarnation : des hommes dont le cœur est chez Dieu et dont le corps est sur la terre. Mais ces hommes sont d'autant plus certains de leur réussite temporelle que leur cœur sera davantage fixé dans les réalités éternelles.

            Il n'y a pas de conflit entre le matériel et l'esprit. En soi, il n'y en a pas. Ce conflit a été introduit par la tentation et par le péché auquel on a succombé. C'est cette tension entre les deux. Mais dès qu'un homme retrouve sa place dans l'univers de Dieu, l'univers matériel aussitôt lui devient soumis. Il n'y a plus de conflit.

 

            L'ensemble et les détails les plus concrets, les plus petits, les plus contraignants de notre vie humaine matérielle sont toujours illuminés par le monde de Dieu auquel ils sont ordonnés. Il y a aussi souvent des choix à faire, des décisions à prendre qui ne sont pas nécessairement conformes aux impératifs de la sagesse humaine. C'est là que doit intervenir le conseil. L'Abbé prend conseil pour être certain qu'il va agir suivant la volonté de Dieu. Dieu va faire connaître sa volonté.

 

            Il doit toujours être donc à l'écoute de Dieu. Et la Parole de Dieu va prendre parfois des canaux inattendus. Comme Saint Benoît le dit ici: C'est souvent que Dieu révèle à un plus jeune ce qui est meilleur, 3,7. Donc n'allons pas nous  dire : « Moi, je suis un ancien, j'ai tellement d'expérience, je suis certain que ma vision est selon le cœur de Dieu. » Non, peut-être que la vérité est en train de trotter dans la tête du plus jeune de la communauté. Dieu est en train d'imprimer quelque chose en lui.

 

            Si je ne prends pas ce conseil, si je passe à côté, eh bien la Parole de Dieu passe aussi à côté de moi. C'est ce que Saint Benoît nous dit ici. Si donc l’Abbé est un sage, il aura une oreille de sage, c'est à dire une oreille qui écoute. Il écoute Dieu parler à sa conscience directement ou bien par l'intermédiaire des frères. Cela ne veut pas dire que l'Abbé doit être un homme timoré qui n'ose pas prendre ses responsabilités. Loin de là !

            Saint Benoît dira très bien : l'Abbé ensuite réfléchira à par soi. Il fera ensuite ce qu'il aura jugé le plus utile. C'est donc à lui que revient le jugement. Il doit faire le tri. Mais vraiment à ce moment-là, il doit être entièrement ouvert. Il ne peut pas avoir d'idées préconçues. Naturellement il a sa vision à lui, mais il ne doit pas y être accroché.

 

 

Chapitre 3 : L’avis des frères ?                  17.05.87

      Suivre la volonté de Dieu !

 

Mes frères,

 

            ...............manque la première phrase..........

Autrefois, l'Abbé était considéré comme celui qui devait veiller à l'application correcte pour sa communauté des décisions prises à un niveau plus élevé, à savoir le Chapitre Général qui était l’autorité suprême de l'Ordre.

 

            L'Abbé veillait donc à la régularité de l'Observance, une Observance réglée dans les moindres détails. Et c'était cette uniformité de l'Observance dans toutes les maisons de l'Ordre qui exprimait, protégeait, garantissait l'unité de l'Ordre. Ce n'est pas tellement loin de nous. Les anciens et même les moins anciens de la communauté ont encore connu ce régime de vie.

            L'Ordre était à l'époque fortement centralisé : Le Chapitre Général qui se réunissait chaque année et qui, justement, discutait de questions d'Observance. Puis l'Abbé Général qui avait des pouvoirs très étendus. Rappelons-nous le dernier Abbé Général de cette génération, Dom Gabriel Sortais, qui était vraiment un homme d'une figure exceptionnelle. Et enfin, il y avait le Définitoire.

 

            Mais depuis le Concile, une évolution s'est dessinée dans le sens d'une unité fondée sur la communion à un même idéal, à un même charisme déposé dans le cœur des frères par la vertu de nos Fondateurs, de nos Réformateurs du douzième siècle. Cela modifie considérablement la figure de l'Abbé qui doit devenir ce qu'on appelle aujourd'hui, entre guillemets naturellement, un animateur spirituel. Mais sous quelle forme ? Et c'est là que surgissent les questions.

 

            Ces derniers jours, je me suis efforcé de dégager certains traits du visage de l'Abbé selon Saint Benoît. Pour comprendre ce qu'est un Abbé selon la grande Tradition Bénédictine et Cistercienne le mieux, mes frères, c'est d'observer un véritable Abbé, c'est de le regarder vivre.

            Or, nous avons le bonheur de vivre journellement dans la compagnie de notre Père Saint Benoît et de nos Abbés Fondateurs. Nous pouvons les regarder et les contempler avec les yeux de notre coeur. Cela demande un petit effort. Nous devons détourner notre regard de nous-mêmes pour aller chercher à l'extérieur de nous ce qui doit inspirer notre vie.

            Mais vous savez que le travail est largement récompensé car il vaut infiniment mieux vivre avec de véritables Abbés que de discuter à partir de concepts, que d'élaborer des théories à partir de principes. Rien de tel, mes frères, rien de plus contagieux que la vie et que l'exemple.

 

            C'est ainsi que la koinônia, la communion avec nos Fondateurs est un enseignement perpétuel qui vaut pour aujourd'hui. Car c'est essentiellement à l'intérieur de la praxis, donc d'une pratique de vie, que se trouve la source de la lumière et du progrès encore aujourd'hui. Cela vaut pour tous les temps !

 

            Certains dans notre Ordre voudraient voir dans l'Abbé le simple exécutant des volontés du groupe. Le groupe définirait donc lui-même un projet de vie et c'est l'Abbé qui serait le coordinateur des énergies du groupe afin de réaliser ce plan qui aurait été élaboré en commun.

            Mes frères, ça existe aujourd'hui, ça se trouve, ça se vit. Mais quand nous avons compris ce qu'était Saint Benoît, nous comprenons que un tel mode de vie est une sorte de sarabaïsme de grand format, non plus à l'échelle de trois ou quatre hommes comme dit Saint Benoît, mais de toute une communauté.

            Ce qui doit apparaître, mes frères, Saint Benoît nous le dit bien aujourd'hui, ce n'est pas la volonté du groupe, mais la volonté de Dieu sur les frères.

 

            Voyez, Saint Benoît présente d'abord l'Abbé - nous avons vu pourquoi - puis immédiatement après la communauté. C'est seulement au chapitre quatrième qu'il va commencer à parler des choses proprement spirituelles, je veux dire un programme spirituel. L'Abbé et les frères forment un Corps dont l'Abbé est la tête. Et une des fonctions de l'Abbé, une de ces grâces, c'est de pouvoir dégager, faire apparaître la volonté de Dieu sur la communauté. Mais il le fait avec prudence.

            Il n'est pas un inspiré. Il n'est pas une sorte de gourou pour une communauté. Non, il est à l'écoute de l'Esprit, de l'Esprit qui parle à l'Eglise locale qu'est la communauté. Cet Esprit va s'exprimer à travers la communauté. Il est donc à l'écoute des frères, de tous, des anciens mais aussi des plus jeunes. Et Saint Benoît prévoit le cas, ici, où il y a quelque chose, où vraiment on fait une enquête parmi les frères.

            Mais l'Abbé est à l'écoute en permanence. Il est l'oreille de la communauté. Et cette oreille attentive va percevoir, entendre le chant de l'Esprit. Et dans ce souffle de l'Esprit, dans cette musique de l'Esprit entendre la volonté de Dieu sur la communauté.

 

            C'est donc, mes frères, dans une ambiance de foi, de confiance mutuelle, d'audace au sein de relations correctes Abbé-frères, frères entre eux, que chacun pourra vivre et réaliser pleinement sa vocation, c'est à dire - on ne le rappellera jamais assez - devenir un seul esprit avec le Christ, permettre à la vie du Christ ressuscité de triompher dans le cœur d'un homme, déjà connaître les prémices de sa propre résurrection et ainsi, former un Corps, un Corps qui se développe, un Corps qui grandit en Dieu.

 

            Voilà, mes frères, ce que nous nous efforçons de faire jour après jour. Cela exige un mouvement infini de conversion, conversion de l'égocentrisme à la charité. Mais une fois qu'on a goûté à cette charité, on ne peut plus revenir en arrière. Pourquoi ?

            Parce que la charité, c'est l'Esprit de Dieu. La charité, c'est Dieu lui-même. Et une fois qu'on est près de Dieu, qu'on est séduit par Dieu, on commence à goûter la vie éternelle qui a un goût de sagesse, un goût que le monde ne peut pas donner, que la chair ne peut pas donner. Et puis, il suffit de se laisser grandir, de se laisser conduire jusqu'à sa taille parfaite d'adulte dans le Christ.

 

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       16.09.87

      Chacun à sa place !

 

Mes frères,

 

            Admirons une fois de plus la discrétion de notre père Saint Benoît. L'Abbé tient la place du Christ dans le monastère, mais il n'est pas le Christ. Même s'il est mort à lui-même, il demeure un homme faible, faillible, sujet à l'erreur. Il n'est pas un illuminé qui croit en ses propres inspirations. Il n'est pas non plus un charismatique soulevé par des forces soudaines.           

            Non, il est un homme lucide, humble et réaliste. Il écoute Dieu dans le secret de son coeur mais en sympathie avec les frères qui forment l'Eglise monastique. Il n'est donc jamais un homme seul.

 

            Naturellement, il vit dans une certaine solitude comme les autres frères, solitude plus profonde peut-être encore à cause de la mission qu'il a reçue de Dieu. Mais il n'est jamais coupé des frères. Il n'est jamais séparé d'eux et il vit en sympathie, en consonance avec eux. Tout ce que les frères vivent se répercute dans son cœur à lui.

            Si bien que lorsqu'il écoute Dieu à tout moment, c'est toujours dans son propre coeur, mais aussi dans le cœur des frères. Et c'est cette unité avec les frères qui le maintient à sa place et qui fait de lui le véritable Oracle de Dieu pour la communauté.

 

            Comme le dit Saint Benoît, pour les affaires importantes, difficiles, douteuses, il interroge Dieu présent dans les frères. Il s'agit de choses qui ne sont pas prévues par la Règle. Saint Benoît ne pouvait pas tout prévoir. Il trace les grandes lignes, il ouvre les routes. Mais dans le concret, il y a tellement de choses qui surviennent que l'Abbé se trouve parfois devant des situations qui font entrer le doute dans son esprit : où est donc la volonté de Dieu en cette chose ? Il va donc interroger Dieu présent dans la communauté, Dieu veillant dans le cœur des frères.

 

            Mais lorsque l'Abbé interroge les frères, il est nécessaire que les frères eux-mêmes soient dans une certaine disposition de cœur. Ils doivent être détachés de leur propre opinion tout autant que l'Abbé. Personne ne doit chercher à faire passer ses idées propres. Saint Benoît dit : ils n'auront pas la présomption de soutenir effrontément leur manière de voir, 3,11. C'est très difficile parce que nous sommes très attachés à nos idées.

            Nos idées font corps avec nous et céder devant le jugement, devant l'idée d'un autre, c'est un bel exercice de détachement. Et c'est un arrachement, c'est une petite mort. Cela fait mal, cela fait souffrir. Alors en réaction, on serait tenté de se laisser emporter par les tendances agressives qui veillent en nous et soutenir effrontément notre manière de voir.

 

            Saint Benoît dit : procaciter, 3,11. Donc tous doivent plutôt chercher uniquement la volonté de Dieu. Tous donnent leur avis, mais sans attachement. Je pense que Saint Benoît exige tout de même de la vertu de la part des moines. Et ce n'est pas étonnant, c'est même très bien. Quand on est dans le monastère, c'est tout de même pour grandir, pour évoluer, pour se détacher de soi, pour s'attacher à la volonté de Dieu. Saint Benoît fait confiance aux frères. Alors la vérité ainsi va pouvoir se détacher, va pouvoir se dégager aux yeux de l'Abbé à partir de la collation des avis qu’il aura reçu.

 

            Il dépend, dit-il, de l'Abbé de décider ce qui vaut le mieux. Tous alors devront s'y soumettre, 3,13. Vraiment Saint Benoît nous oblige à rester au plan surnaturel. Il arrive que Dieu révèle au plus jeune ce qui est le meilleur. Là, il remet l'Abbé à sa place. Puis, tous devront se soumettre à la décision de l'Abbé. Là, il remet les frères à leur place. Si bien que chacun étant à sa place, le monastère est dans la paix.

            Mais encore une fois, il faut que le cœur y soit. La façon de procéder de Saint Benoît sera donc toujours un facteur d'unité et de paix. Mais, je le répète, cela exige un grand esprit surnaturel.

 

            Saint Benoît n'exige pas que cette consultation se fasse en public. Il convoque toute la communauté, il expose lui-même ce dont il s'agit. Mais l'avis des frères, il peut le recueillir soit en public, soit en privé, ou les deux ensembles.

            Il y en a qui n'osent pas, qui ne peuvent même pas donner leur avis en public. Ils sont comme ça. Donner les avis en public, ça peut aussi parfois déclencher des passions qui ne sont pas bienvenues. Il est parfois plus prudent et plus sage de demander l'avis en privé. Alors le frère est beaucoup plus libre de parler, beaucoup plus fort pour dire ce qu'il a sur le cœur.

 

Chapitre 3, 15-fin : L’avis des frères ? (2)     17.09.87

      Pas d’illusions ! 

 

Mes frères,

 

            Saint Benoît use parfois d'une certaine redondance verbale intentionnelle afin d'aiguiser notre attention, afin de nous réveiller si nous sommes assoupis. Il veut nous arracher à l'illusion et nous enraciner dans le vrai, le réel. Nous en avons encore un exemple aujourd'hui : in omnibus igitur omnes, dit-il, 3,16, en toutes choses, tous.

 

            Dès que j'ai relu ceci, je me suis dit qu'il y avait là peut-être une évocation lointaine du Psaume 23 : Au Seigneur est la terre et tout ce qui l'emplit, l'univers et tous ceux qui l'habitent. Vous avez là aussi une amplification, une redondance. Saint Benoît vit la réalité divine de la création, de l'Alliance, de la Providence, cette Providence qui nous guide, qui nous gouverne, nous moines, par le moyen de la Règle qui est Maître de vie. En toutes choses, tous suivront la Règle comme un Maître et personne ne se permettra de s'en écarter à la légère, 3,16-18. Temere, cela veut dire avec témérité. C'est plus que à la légère, c'est presque avec effronterie.

 

            Pour Saint Benoît le monastère est un microcosme qui récapitule l'univers et son histoire. Lorsque il est dit que Saint Benoît contemplait le monde ramassé dans un rayon de lumière, ça ne doit pas nous étonner. Car pour lui, déjà, son monastère était un raccourci, un condensé du monde entier, du monde matériel. Car le monastère est fait de bâtiments, il est fait de terre, il est fait d'arbres, il est fait d'eau. Mais il est aussi un condensé du monde des humains, d'une humanité en route vers un ailleurs qui est un chez Dieu.

 

            L'audace surnaturelle de Saint Benoît pourrait nous paraître .. ? .., démesure, orgueil, dérèglement d'esprit. En réalité elle est affirmation tranquille et puissante d'une vérité vue et vécue. Quand on parle de la vie monastique contemplative, il faut s'élever à ces altitudes. Il faut apprendre à saisir le réel à partir de chez Dieu, Dieu qui est le réel suprême d'où tout découle et par qui tout s'ordonne.

            Le moine est un homme en voie de divinisation, comme tout chrétien d'ailleurs. Mais le moine a consacré toute sa vie à la réalisation de son projet. Il faut que ce plan de Dieu, ce plan d'amour s'achève et s'accomplisse à la perfection chez le moine. A ce moment-là, le moine est chez Dieu. Il est tout naturel, il lui devient tout naturel de voir les choses non plus d'un point de vue étroitement humain, mais d'un point de vue infiniment divin. C'est un retournement, un renversement des perspectives. Et c'est cela que nous appelons la foi.

 

            La foi, c'est connaître Dieu par l'intérieur de lui-même, le connaître comme il se connaît. C'est être chez Dieu. Et à partir de ce point de vue, de cet endroit, de ce belvédère contempler tout, voir tout comme Dieu le voit. Dans la pratique concrète de la vie, cela entraîne parfois des prises de position qui peuvent paraître folles au regard de la raison. Mais le moine qui est là chez Dieu sait très bien que ce qu'il voit et ce qu'il fait est sagesse.

 

            Si bien, mes frères, que le lieu du moine, le lieu de sa stabilité, c'est ce Royaume, ce monde à venir où on est avec Dieu. Il y a une sta.... loco qui est le lieu du monastère. Mais n'oublions pas qu'à l'intérieur de ce périmètre qui délimité un territoire bien précis, on est chez Dieu. Si je me stabilise ici à Saint Rémy, c'est parce que Saint Rémy est un endroit où apparaît une fraction du Royaume de Dieu.

 

            Si je suis logique avec cette vision de la réalité, si je m'y engage, si je m'entraîne - c'est toute une ascèse - si je m'entraîne à regarder et à vivre à partir de ce lieu qui est chez Dieu, à ce moment-là la foi grandit en moi. Et alors se montent en moi des réflexes qui commencent à être des réflexes divins et je vais goûter le quasi naturaliter de Saint Benoît. Et cela va devenir tout naturel, sans efforts. De cet endroit, avec Saint Benoît, en toutes choses, tous nous voulons et nous aimons Dieu en tout et pour tous les hommes.

 

            Nous revenons à notre point de départ : le monastère est un microcosme, une miniaturisation de l'univers entier. Et s'il est habité par des hommes dont la seule fonction est d'aimer ; à ce moment l'univers entier est déjà dans son accomplissement et il est déjà sauvé. Ainsi nous accomplissons parfaitement le rôle, la mission qui nous est dévolue dans le plan de Dieu.

 

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       16.09.89

      Rester jeune !

 

Mes frères,

 

            Depuis le temps que j'entends lire au Chapitre la Règle de Saint Benoît, je la connais presque par cœur. Je sais déjà à l'avance ce qu'il va être dit. Et pourtant, j'ai le sentiment chaque fois de l'entendre proclamer pour la première fois. Elle me paraît toute neuve, toute jeune. Je pense que c'est ce caractère d'éternelle jeunesse et de perpétuelle nouveauté qui en fait non seulement l'attrait, mais la puissance et la sainteté.

            Si nous voulons apprendre à connaître notre Père Saint Benoît, nous devons nous attarder sur des chapitres où il traite des rapports entre l'Abbé et les frères. Nous en avons un exemple ici.

 

            Nous voyons, nous constatons la souveraine liberté de Saint Benoît. Il est totalement détaché de ses idées. Il n'a pas de projets. Il est entièrement suspendu à la volonté de Dieu.   

            Il y a le gouvernement ordinaire de la communauté, des choses qui sont réglées une fois pour toutes et puis qui s'opèrent quasi naturellement. Tout le monde est entrée dans le mouvement.

            Il y a des choses extraordinaires qui se présentent plus rarement et alors l'Abbé peut être pris de court. Il ne voit pas trop bien quelle est la volonté de Dieu dans la chose. Et Saint Benoît lui conseille de faire ce que lui-même faisait, c'est à dire de prendre conseil.

 

            Mais pour prendre conseil, il faut encore une fois être mort à soi et il faut, je pense, avoir déposé une fois pour toute la jalousie. En effet, on peut être jaloux de ses idées. On peut être jaloux de l'importance qu'on occupe à l'intérieur de la communauté, on peut être jaloux des autres frères dont certains, pour la matière qui est en suspens, pourraient être plus intelligents, plus informés, plus compétents que l'Abbé.

            Mais non, ce que Saint Benoît désire, c'est laisser toute l'initiative à Dieu lui-même. Il ne vois donc pas les frères, je dirais, dans leur individualité, et leurs défauts, et leurs qualités. Non, il voit Dieu qui par l'intermédiaire des frères pris dans leur ensemble, et peut-être par la voix d'un de ces frères, va faire connaître sa volonté sur le sujet qui est en suspens.

 

            Et remarquez ici cette petite note qu'on connaît : Dieu révèle souvent, dit-il, saepe, 3,7, à un plus jeune ce qui est meilleur. Là aussi nous voyons que Saint Benoît a déposé une fois pour toute le défaut de la jalousie, car un jeune n'a qu'une chose à faire, c'est de se taire.             Mais non, Saint Benoît dit : dans une circonstance pareille, il doit parler. Et souvent, c'est le jeune qui donnera l'avis décisif, celui sur lequel l'Abbé s'arrêtera, sur lequel il réfléchira. Mais pourquoi ? Mais c'est parce que Dieu, l'Esprit Saint travaille dans le cœur du frère et va révéler par ses lèvres sa volonté.

 

            Eh bien, il y a aussi ceci chez les jeunes, ne l'oublions pas : lorsqu'on est pendant longtemps dans un monastère, il y a une certaine routine qui s'installe dans la communauté, c'est à dire qu'on voit toujours les choses, elles ont pris une certaine coloration. On ne voit plus que cette couleur et on n'imagine pas que ça puisse être autrement.

            Tandis que le jeune, c'est à dire le nouveau venu qui arrive, qui est là, pour lui tout est neuf et il remarque des coïncidences, des relations, des rapports qui échappent à celui qui est là toujours à l'intérieur.

            Si bien que le jeune, en toute candeur, donne un avis qui est neuf parce que son regard est nouveau. Je ne dirais pas que son regard est pur, ce n'est pas nécessaire, mais son regard est nouveau et l'Esprit Saint peut se servir de ce regard pour faire connaître sa volonté.

 

            Donc, mes frères, ne méprisons jamais les jeunes. Et l'idéal, c'est de rester jeune toute sa vie, avoir un cœur toujours en éveil, un cœur qui est toujours heureux, un cœur, oui, un cœur de Dieu, voilà le mot. Donc un cœur en voie de divinisation.

            Et vous savez que Dieu, lui, c'est le jeune par excellence. Si Dieu n'avait pas été jeune, s'il n'avait pas eu un esprit jeune, il ne se serait jamais incarné. Il ne se serait pas livré jusqu'à la mort sur une croix. Il doit y avoir dans un cœur jeune un petit grain, ou un gros grain de folie.

            Et ce qui se trouve aussi dans le cœur des jeunes - au plan de la carte d'identité - c'est qu'ils sont un peu sot-sot. Il faut le comprendre, il faut leur pardonner, c'est de leur âge. Mais il y a aussi cette folie divine qui est l’œuvre de l'Esprit et qui doit régenter, qui doit conduire, regere un cœur de moine.

 

Chapitre 3 : L’avis des frères ?                  16.01.90

      Prendre l’avis du plus jeune ?

 

Mes frères,

 

            Voici encore un petit trait qui indique que le monastère est au moins l'antichambre du monde à venir, de la création nouvelle, du Royaume de Dieu. C'est que Dieu révèle souvent à un plus jeune ce qui est meilleur. Dans le monde, on réagit tout autrement. Les jeunes doivent se taire. C'est aux anciens à décider.

            Dans le monastère, Dieu bouscule les règles de la sagesse humaine et parfois il ouvre l'esprit d'un plus jeune et il lui fait donner le meilleur avis. C'était déjà comme ça depuis toujours. C'est une façon d'agir de Dieu. C'est l'enfant Samuel qui va porter à Elie la sentence de condamnation.

 

            Pour en arriver là et donner un avis, un avis objectif et qui vient de Dieu même si on est jeune, il faut tout de même chercher Dieu vraiment. Il n'est pas requis d'être un saint, d'être possédé par l'Esprit, mais il est nécessaire d'avoir au cœur le désir de lui appartenir un jour totalement.

            Et à ce moment-là, Dieu se saisit du cœur de ce jeune et il lui fait dire des choses auxquelles le jeune lui-même ne penserait pas. Ce n'est pas lui qui parle, c'est l'Esprit de Dieu qui parle par sa bouche et qui indique à l'Abbé et à la communauté la route à choisir.

            Mais alors, pour que vraiment la communauté soit déjà une cellule de la création nouvelle, il faut que la communauté suive. Il faut donc que l'humilité habite le cœur des anciens, qu'ils ne soient pas jaloux, qu'ils ne se moquent pas de ce jeune, qu'ils aient suffisamment de lucidité spirituelle pour se dire que c'est Dieu qui leur adresse un oracle, Dieu qui choisit n'importe qui.

 

            N'oublions pas que pour des hommes de la trempe de saint Benoît qui savaient lire le secret des êtres, le secret des choses, ils croyaient bien sincèrement que même un animal pouvait indiquer la route qui conduit vers Dieu. Ils pensaient au Prophète Balaam et à son ânesse qui commençait à parler et à lui dire ce que Balaam devait faire. Ne peut-on pas imaginer qu'un animal puisse nous dire ce qu'il y a de meilleur. Mais pourquoi pas ?

            Cela ne veut pas dire que nous devons espérer un miracle et entendre les animaux s'adresser à nous avec des paroles d'homme. Non, mais dans leur langage d'animal, souvent les animaux ont un instinct qui est encore pur. Et si on sait les observer, on sait voir, on sait lire des messages qui peuvent nous concerner.

 

            Par exemple : des messages de sobriété dans la nourriture, des messages d'abandon à la Providence pour ce qui regarde les affaires de ce monde. Le Christ lui-même l'a dit : Regardez les oiseaux du ciel, ils ne sèment pas, ils ne moissonnent pas, et c'est votre Père qui les nourrit. Alors pourquoi, vous qui êtes ses enfants, vous faire tant de soucis ?

 

            Les moines, surtout un saint comme notre Père Antoine, savaient déchiffrer les messages que Dieu adressait comme ça aux hommes, messages qu'il adresse sans arrêt. Nous devrions affiner nos sens physiques, et aussi à travers eux nos sens spirituels, pour lire le logos des choses, pour découvrir le Verbe de Dieu, la parole de Dieu cachée dans les choses inanimées, dans les choses vivantes.

            Nous sommes ici dans un environnement qui est très, très beau, surtout au printemps, en été lorsque toute cette végétation reprend vie. Et à ce moment-là, ouvrons largement notre cœur - parce que c'est le cœur qui voit, c'est le cœur qui entend - et accueillons tout ce que le Seigneur nous dit. C'est tellement simple, c'est tellement naturel et, en même temps, c'est tellement divin.

 

            Eh bien, mes frères, je ne savais pas du tout que j'allais vous dire ça, si bien qu'il est temps de nous rendre à l'église.

 

 

Chapitre 3, 15-fin : L’avis des frères ? (2)     17.01.92

      La Règle est un maître !

 

Mes frères,

 

            Saint Benoît use aujourd'hui d'une expression sur laquelle nous ne pouvons glisser à la légère. Il nous dit que la Règle est une magistra, 3,16, qu'elle est une Maîtresse de science et de sagesse, une Maîtresse de vertu et de vie. Et un peut plus haut, il dit que l'Abbé est un magister, 3,14, en face de ses frères qui sont en réalité des disciples. Que signifie donc ce mot magister ou magistra ? Et bien magister signifie étymologiquement parlant celui qui possède un plus, magis. Il a donc un plus qui n'est pas le bien des autres.

 

            Et ce plus de science, ce plus d'expérience, ce plus de vie, il ne peut pas le garder jalousement pour lui. Il doit le partager avec ses disciples qui en sont démunis et qui l'attendent de lui parce qu'ils en sont avides.

            Il va donc de son plus donner un plus à ses frères. Et ainsi de jour en jour, tous vont grandir à l'intérieur d'un univers qui ne cessera de les enrichir. Mais il faut toujours que l'Abbé ait un plus que ses frères ne possèdent pas. C'est toujours ne l'oublions pas un plus de sagesse, un plus d'expérience, un plus de vie.

 

            A partir de là, nous comprenons mieux tout ce que Saint Benoît attend d'un Abbé, tout ce qu'il exige d'un Abbé. Nous comprenons aussi que la sagesse spirituelle, que la vie spirituelle se transmettent. Elles sont le fruit d'un engendrement. C'est un trop-plein qui déborde du cœur de celui qui est le Père de la communauté et qui se répand dans le cœur des disciples qui en ont faim et qui s'en nourrissent. Les deux, Abba et magister, vont toujours ensemble. L'Abbé est Abba, donc il est Père. Il est engendreur parce qu'il est magister, parce qu'il est le dépositaire de ce plus.

 

            Vous allez peut-être dire qu'il y aurait chez moi tout de même une certaine prétention d'affirmer cela parce que je suis tout de même l'Abbé. La journée d'aujourd'hui nous le rappelle ( anniversaire de la bénédiction Abbatiale). Mais voilà, je pense que la bénédiction Abbatiale, donc cette invocation de l'Esprit qui est prononcée sur l'Abbé est efficace jusqu'à la fin de la mission de cet Abbé à condition naturellement qu'il soit lui-même ouvert à cet influx spirituel.

            Il n'est donc pas Abbé pour lui. Il ne possède pas ce plus pour lui mais parce qu'il doit le partager. Il lui est donné non pas comme une possession personnelle, privée, sur laquelle il devrait se fermer mais comme un dépôt, un depositum, le depositum fidei, le depositum de la vie monastique qu'il doit libéralement, généreusement partager avec tous.

 

            Or, voici que Saint Benoît a l'audace d'affirmer que sa Règle est Maîtresse absolue de la vie véritable. Et tous doivent recevoir d'elle, même le magister qu'est l'Abbé, omnes magistram sequantur regulam, 3,17, TOUS, à commencer par l'Abbé.

            Il y a donc ici un absolu auquel absolument tout le monde dans le monastère doit se soumettre. Et n'oublions pas que cette Règle est l’œuvre de Saint Benoît. Et voilà qu'il lui donne ce caractère vraiment, allez, omnipotent. Je ne dirais pas dictatorial, ni despotique quoique un esprit mal tourné pourrait très bien le comprendre de cette façon-là mais plutôt une plénitude de service à partir de cette Règle.

 

            La Règle n'est donc pas un code élaboré par les hommes et qui serait sujet à révision. Non, elle est un tout qu'il faut prendre. La Règle est un trop-plein de vie, le trop-plein d'une expérience mais pas celle de n’importe qui, l'expérience d'un saint. Et alors davantage encore, l'expérience d'une foule de saints. A l'origine de la Règle se trouve Dieu dans son amour et dans sa providence.

 

Table des matières

Chapitre 3,16-30 : L’avis des frères ? (2)      17.01.84. 1

La Règle, maîtresse de vie ! 1

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       17.05.85. 3

Prendre l’avis des frères ?. 3

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       16.09.86. 5

Suivre la Règle notre maître ! 5

Chapitre 3, 16-fin : L’avis des frères ? (2)     16.09.86. 7

Les conseils de l’Abbé ! 7

Chapitre 3 : L’avis des frères ?                  17.05.87. 9

Suivre la volonté de Dieu ! 9

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       16.09.87. 11

Chacun à sa place ! 11

Chapitre 3, 15-fin : L’avis des frères ? (2)     17.09.87. 12

Pas d’illusions ! 12

Chapitre 3, 1-15 : L’avis des frères ? (1)       16.09.89. 13

Rester jeune ! 13

Chapitre 3 : L’avis des frères ?                  16.01.90. 15

Prendre l’avis du plus jeune ?. 15

Chapitre 3, 15-fin : L’avis des frères ? (2)     17.01.92. 16

La Règle est un maître ! 16